On ne raconte pas des histoires comme on vend un produit
Quel doit être le positionnement des annonceurs et des agences par rapport à l'émergence du storytelling et du brand content? Réponse du fondateur et patron de l'agence de communication 1min30
Si les marques deviennent des médias, si le marketing 3.0 devient celui des valeurs et non plus de l'offre, le marketing et la communication doivent aujourd'hui raconter des histoires et non plus vendre un produit ou un service, or on ne raconte pas des histoires comme on vend un produit.
En effet, si les départements marketing communication et les agences pouvaient s'organiser en silo - produit, études, création, achat d'espace, relations presse - silos démultipliés avec l'arrivée du digital: web, mobile, référencement, contenu, community management, vidéo, etc. avec pour seul point de repère le produit et le service pour assurer la cohérence entre leurs différentes prestations, il devient difficile de conserver une telle organisation.
Gérer la cohérence d'une histoire, d'un storytelling, nécessite une coordination plus importantes entre les équipes et les prestations que la vente d'un produit ou d'un service. Un produit ou un service se définit par lui même, et chacun peut apporter les réponses aux questions qu'il se pose: Quelles sont les nouvelles fonctionnalités à rajouter? Qui sont ses consommateurs? Quels sont ses attributs à mettre en avant? Dans quel support? Une histoire est plus subtile et nécessite un garant, un auteur, un scénariste, chacun ne peut pas y aller de sa propre histoire au risque de perdre le fil et la cohérence d'ensemble.
Ainsi l'organisation par silo me semble caduque en particulier dans le digital, où l'importance du storytelling est prédominante car c'est l'espace de libre expression de la marque, l'espace où elle peut être sont propres médias sans s'appuyer sur des médias tiers. Ainsi, je ne comprends pas comment on peut scinder les prestations entre référencement, contenu, community management et relations presse par exemple? Alors que le contenu, l'histoire est au coeur de chacune de ses activités.
Le référenceur ne doit pas raconter une histoire différente que celle de l'auteur quand il construit ses liens et le community manager ou l'attaché de presse ne peuvent pas partager une autre histoire que celle qui a été écrite pour eux. L'histoire devient la trame centrale. Le référencement, le community management, les relations presse, ne sont que des relais de diffusion de celle-ci. Si l'histoire est bonne, elle sera facile à raconter et à partager, des liens naturels pointeront vers elle, complétés par des mentions presse, des relais sur les réseaux sociaux et peut être quelques liens artificiels (guest blogging, communiqués de presse, annuaire) pour optimiser le tout. Si l'histoire est mauvaise, point de tout cela, seuls les liens artificiels perdureront mais ils ne suffiront plus pour influencer à eux seuls les moteurs de recherches avec les dernières versions de leur algorithme.
Et puis, si la cohérence de l'histoire est maintenue sur le digital, il n'y a pas de raison qu'elle ne se prolonge pas offline, sur le produit en lui même (packaging), sur le lieu de vente (PLV), dans les campagnes de communication externe (TV, radio, presse, affichage, etc.).
Le storytelling, sa ligne éditoriale, son format, son positionnement deviennent les fils conducteurs de la stratégie de marketing communication, en lieu et place du produit et du service. Le directeur marketing communication doit alors devenir éditeur en chef et animer une équipe éditoriale en nommant un rédacteur en chef ou en cumulant cette fonction. Il peut aussi faire appel à un éditeur délégué qui assurera la réalisation et la cohérence de son propre média. C'est à mon sens, l'avenir des agences, devenir éditeur délégué des marques qui deviennent leur propre média.
Gabriel Dabi - Schwebel fondateur de l'agence de communication 1min30