La mort annoncée des cookies (tiers) : et maintenant ?

durand

Début 2020, Google annonce l’extinction progressive des cookies tiers sur son navigateur Chrome, suivant en cela le chemin déjà emprunté par Mozilla et Apple. De quoi faire frémir le monde de la publicité digitale et toutes les entreprises dont le business model repose sur le suivi du comportement des internautes par le biais de ces cookies. Cette tendance générale a d’ailleurs été renforcée par les récentes délibérations de la CNIL.

Le glas a donc sonné : d’ici 2022, les annonceurs devront se passer des cookies tiers, et revoir leur stratégie de marketing digital. Un formidable vecteur d’opportunités pour de nombreuses entreprises.

Vers un web plus sécurisé et transparent

En matière de publicité en ligne, les cookies tiers se sont imposés comme un pilier opérationnel essentiel aux annonceurs. D’où leur multiplication. Données personnelles, parcours de navigation et historique des achats, … Les données collectées via les cookies placés sur des sites partenaires permettent de déduire les comportements et les centres d’intérêt des internautes. Puis de les cibler avec des annonces publicitaires personnalisées.

L’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données (RGPD) en 2018 avait déjà encadré ce “Far West” que pouvaient constituer les cookies tiers. Leur dépôt sur les terminaux des internautes, et par conséquent la collecte de données personnelles, était réalisé à leur insu et sans information sur leur utilité.

Si depuis 2018 le consentement formel des internautes est exigé pour l’usage de cookies tiers, la pratique reste controversée : protection des données personnelles et immersion dans la vie privée semblent en effet difficilement conciliables, au point que près de la moitié des internautes utiliseraient un bloqueur de publicités.

En signant la fin des cookies tiers dans Chrome, qui représente 65% des parts de marché des navigateurs, Google s’inscrit dans une tendance grandissante, dans laquelle la sécurité et le respect de la sphère privée des internautes priment sur la création de profils utilisateurs par le marketing digital. Et il y a tout à parier que d’autres entreprises vont suivre la même voie, poussées par cet exemple et par les législations récentes et à venir.

L’exploitation des données « propriétaires » pour pallier la fin des cookies tiers

Dans ce contexte, quid du vide laissé par les cookies tiers et qu’advient-il du ciblage marketing basé sur l’analyse de la navigation ? Les cookies « first-party » font partie de la réponse. Destinés à améliorer l’expérience des utilisateurs en stockant par exemple des informations relatives à leur connexion ou à leurs achats, ces cookies internes sont générés par les sites visités par les internautes. Pas de notion de tiers dans ce cas : les cookies « first-party » sont associés au nom de domaine du site, contrairement aux cookies tiers qui émanent d’un nom de domaine différent.

Les « first-party data » qui émanent de ces cookies sont donc « propriétaires » car directement collectées par les annonceurs et les médias. Des données exploitées à moins de la moitié de leur potentiel malgré leur grande qualité, selon l’aveu de leurs propriétaires.

Quoi de plus fiable, en effet, que les informations données volontairement par des clients en échange d’une promesse d’amélioration de leur expérience utilisateur ou de remises commerciales ?

Pour les entreprises, la fin annoncée des cookies tiers est donc synonyme de reprise en main de la collecte et de l’analyse de données, à condition de mettre en place des « Customer Data Platforms » (CDP). L’usage d’une plateforme de collecte de données offre en effet la possibilité aux annonceurs de mieux segmenter les données, d’utiliser celles dont ils disposent déjà, notamment grâce aux cookies « first-party », et d’optimiser leur stratégie de communication et d’interaction à l’égard de leurs clients.

L’extinction des cookies tiers, une opportunité business

Le repositionnement forcé de la stratégie marketing des entreprises sur les seuls cookies « first-party » ne constituerait-il pas une formidable opportunité business ?

L’exploitation des données « first-party » au sein d’une Customer Data Platform présage en effet de nombreux bénéfices, à commencer par l’existence d’une source de « vérité » unifiée alimentant l’ensemble des canaux de communication, ainsi qu’une vue à 360 degrés pour l’entreprise, lui permettant de mieux connaître ses clients.

La fin annoncée des cookies tiers présume la collecte d’un volume moins important de données. Mais la qualité va primer sur la quantité, et c’est une excellente nouvelle non seulement en matière de stockage mais aussi de traitement et donc d’utilisation de ces données. La combinaison « data first-party » - CDP promet aux entreprises une stratégie marketing plus pertinente et performante, avec des taux de transformation plus élevés. De quoi s’offrir un marketing digital ultra-qualifié.

La mort des cookies tiers signe-t-elle la fin de la publicité digitale ? Tout au contraire, elle est une opportunité pour affiner sa stratégie, pour consolider les données et ainsi offrir aux internautes et à ses clients une expérience nouvelle, pertinente et personnalisée. De quoi déjouer la tentation du « stop pub ».

(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).

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