La cancel culture ne passera pas par moi !
Pour ne garder des réseaux sociaux que le meilleur, et donc éviter ou écarter le pire, il faut veiller à ne pas tomber dans l’auto-complaisance, en s’autorisant ce qui est interdit aux autres. Par exemple, pour lutter contre le phénomène grandissant de cancel culture, il faut s’assurer de ne pas en être complice, et de ne pas la pratiquer soi-même !
La cancel culture n’est pas une pratique nouvelle, mais elle a été largement amplifiée par les réseaux sociaux qui lui ont donné une nouvelle dimension. Désormais identifiée sous cette appellation, la cancel culture est une des plus regrettables illustrations et conséquences de la tyrannie des réseaux sociaux. Il s’agit de boycott où la violence est légitimée au nom d’une « justice sociale » en faveur d’un monde meilleur. Son objectif est simple : tenter d’interdire le débat, pourtant déjà difficile quand un nombre limité de caractères empêche toute réflexion complexe. Son principe : imposer des idées, en faisant pression sur les personnes ou les organisations pour leur dicter une façon de penser, voire d’agir. C’est la pratique de groupes de pressions qui utilisent le harcèlement, l’intimidation, la dénonciation publique pour affaiblir, voire détruire et donc éliminer, celui ou celle qui ne porterait pas la bonne voix ou la bonne pratique.
La cancel culture montre les limites de la liberté d’expression sur les réseaux sociaux. Alors que ces derniers ont donné au plus grand nombre un espace public pour s’exprimer, ils engendrent aussi des obstacles à cette liberté d’expression. En jouant sur l’émotion populaire, animée ou manipulée, des justiciers du web, des activistes politiques y ont l’opportunité de faire régner, avec une relative impunité, une forme de terreur de la pensée.
Ces pratiques de menaces, d’humiliation, de désinformation sont bien évidemment contraires à nos lois et à notre culture de liberté. C’est pourquoi, nous devons ou devrions rejeter catégoriquement, fermement, définitivement ces dangereuses dérives. Nous devrions aussi les dénoncer, les décrypter, les expliquer, pour les rendre visibles de toutes et tous et compréhensibles pour le plus grand nombre. Mais une partie du succès de ce harcèlement en ligne vient du silence observé, comme souvent, par beaucoup de victimes qui en arrivent à penser qu’évoquer ce type de situation serait honteux ou la preuve d’une faiblesse. Pourtant, la honte ne doit jamais être portée par les victimes. Elle doit toujours être renvoyée sur les agresseurs, quels qu’ils soient !
Mais attention, nous pouvons aussi parfois être facilement, volontairement ou involontairement, les complices de la cancel culture.
On peut en être complice passivement, en laissant faire quand il faudrait réagir, en se taisant au lieu de dénoncer, en préférant se cacher plutôt que s’exposer, par manque de réactivité, par lâcheté ou simplement pour éviter les coups à prendre.
On peut également en être complice par opportunité immédiate et facile, pour régler des comptes, se faire justice soi-même… Cela peut se traduire par la simple publication d’un avis négatif, subjectif, en réaction immédiate à une situation, une émotion, une déception… pouvant donner à celui-ci un écho disproportionné par rapport aux faits, risquant de créer des dommages personnels, professionnels, économiques, hors proportions, durables, injustes…
La cancel culture ne doit son développement et sa prospérité qu’à notre complicité ou à notre passivité. On ne doit ni fermer les yeux, ni se taire. Ce n’est pas chose facile de lutter contre, surtout face à des adversaires souvent anonymes, aux intentions pas toujours claires, aux moyens ou soutiens parfois insoupçonnés. Quoi qu’il en soit, il faut être conscient des méthodes et pratiques dont on peut être victime, les refuser, les dénoncer et surtout les expliquer. Cette communication ne permettra pas d’éviter le mal, mais de l’affronter et d’en réduire les impacts négatifs. Pour cela, il faut avoir la force de se dire : la cancel culture ne passera pas par moi !
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