Taxe sur les GAFA : Bruno Le Maire compte maintenant sur l’OCDE
Le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire a renoncé jeudi à une taxation européenne des géants du numérique et table désormais sur l'OCDE pour trouver un accord international, après avoir reçu des engagements de la part des Etats-Unis. "Il n'y aura pas d'accord (...) sur le projet de directive européenne" pour taxer les géants du numérique sur leur chiffre d'affaires lors de la prochaine réunion de l'Eurogroupe du 12 mars, a reconnu M. Le Maire sur Public Sénat, renonçant implicitement à chercher à convaincre plus longuement l'Irlande, la Suède et le Danemark, les pays qui y sont les plus opposés. Le ministre, qui devrait présenter la semaine prochaine au Conseil des ministres son projet de taxation sur le chiffre d'affaires en France des GAFA, a du coup changé d'objectif à Bruxelles et va désormais s'efforcer de trouver un consensus avec ses homologues européens pour négocier un accord mondial au sein de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).
"On peut trouver un nouvel accord pour qu'il y ait une position commune européenne à l'OCDE et, avec le soutien des Etats-Unis, nous puissions avoir une taxation du digital proposée au niveau international à l'OCDE d'ici la fin de l'année 2019", a-t-il expliqué au lendemain d'une rencontre à Bercy avec le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin. "Nous espérons pouvoir régler ce problème ensemble cette année", avait déclaré le responsable américain lors d'une conférence de presse aux côtés de M. Le Maire, confirmant ainsi publiquement le changement d'attitude de Washington qui bloquait depuis plusieurs années la recherche d'un accord au sein de l'OCDE sur la taxation du numérique. M. Mnuchin a certes réitéré son opposition au projet français de taxer unilatéralement les géants du numérique sur leur chiffre d'affaires, mais il s'est toutefois "réjoui de l'intention française de l'abroger si un accord mondial était trouvé au sein de l'OCDE". "C'est une excellente nouvelle", a réagi M. Le Maire sur Public Sénat. "Les choses bougent et c'est tant mieux", a-t-il ajouté, rappelant que l'Irlande s'est aussi déclarée favorable à la recherche d'un accord au sein de l'OCDE.
Washington dans la boucle
"Au début tout le monde se moquait de nous" quand la France a "mis le sujet sur la table au nom de l'équité fiscale, de la justice et de l'efficacité", a rappelé le ministre, désormais convaincu qu'un accord est possible d'ici la fin de l'année à l'OCDE. La rencontre entre M. Le Maire et M. Mnuchin s'est manifestement avérée fructueuse, le responsable américain ayant soutenu sans équivoque la proposition du ministre français d'établir un impôt minimal et international sur les sociétés, dont il a fait la priorité de sa présidence cette année du G7 Finances. "Nous soutenons absolument cette taxe minimale", a assuré le secrétaire au Trésor. "Avec le soutien des Etats-Unis, la pression sera encore plus forte sur les pays pratiquant des taux bas pour attirer les sièges des multinationales", s'est réjoui l'entourage du ministre.
Lors du Forum économique de Davos, le secrétaire général de l'OCDE, Angel Gurria, s'était déclaré optimiste en envisageant un pré-accord sur la taxation des géants du numérique d'ici la fin de l'année, qui pourrait ainsi entrer en vigueur dès 2020. A Davos, la vice-présidente de Google Ruth Porat avait également apporté son soutien aux négociations au sein de l'OCDE. Dans la foulée, à la fin janvier, 127 pays s'étaient ont mis d'accord pour "continuer de travailler de manière multilatérale afin de trouver une solution de long terme fondée sur le consensus d'ici 2020". Face aux difficultés de trouver un accord au sein de l'OCDE et même de l'Union européenne, des pays comme la France, le Royaume-Uni ou l'Espagne ont annoncé leur intention de taxer unilatéralement les GAFA. (avec l’AFP)