Meta et TikTok défient en justice la nouvelle législation de l'UE

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Le champion américain des réseaux sociaux Meta et son rival chinois TikTok ont ouvert devant la justice européenne un front de contestation sur le champ d'application des nouvelles règles de concurrence de l'UE qui s'appliqueront en mars. La Commission européenne a désigné début septembre 22 plateformes numériques clés qui seront soumises à partir du 6 mars au règlement sur les marchés numériques (DMA).

Le texte instaure de nouvelles règles plus strictes afin d'endiguer les pratiques anticoncurrentielles dans le secteur de la tech. Ces plateformes sont toutes des acteurs incontournables notamment des réseaux sociaux (Facebook, Instagram...), messageries instantanées (WhatsApp, Messenger...), systèmes d'exploitation (Android, Windows...), navigateurs (Chrome, Safari...) ou moteurs de recherche (Google...). Elles appartiennent à six géants des technologies : Alphabet, Amazon, Apple, Meta, Microsoft et le chinois ByteDance, propriétaire de TikTok. Le DMA leur impose un carcan d'obligations et d'interdictions, supervisées par la Commission qui entend ouvrir davantage ces marchés à la concurrence.

Les entreprises en infraction s'exposeront à des amendes pouvant atteindre 20% de leur chiffre d'affaires mondial en cas de récidives, voire à des mesures de démantèlement dans les cas les plus graves. Mais, sans surprise, la législation fait déjà l'objet de recours en justice qui ne sont probablement qu'un avant-goût de futurs litiges sur l'interprétation des textes. Ainsi, Meta a annoncé mercredi soir qu'il contestait devant le Tribunal de l'UE la désignation de sa messagerie instantanée Messenger et de sa place de marché Facebook Marketplace dans le périmètre de la nouvelle loi.

"Clarifier des points de droit"

"Ce recours vise à clarifier des points de droit spécifiques concernant les désignations de Messenger et de Marketplace dans le cadre du DMA. Il ne modifie ni ne diminue notre engagement ferme à nous conformer au DMA", a déclaré un porte-parole de Meta. Parallèlement à cette action en justice, le groupe va en effet continuer de préparer la mise en conformité de Messenger et Marketplace. Il ne remet d'ailleurs pas en cause la présence de quatre autres de ses services (Facebook, Instagram, WhatsApp et ses activités de publicité en ligne) parmi les 22 plateformes couvertes.

TikTok a de son côté annoncé jeudi qu'il allait attaquer en justice sa désignation, se voyant comme un acteur émergeant, de nature à contester les positions dominantes des géants américains. "Notre désignation risque de compromettre l'objectif déclaré de la loi sur les marchés numériques en protégeant les plateformes dominantes des nouveaux concurrents tels que TikTok", a écrit l'entreprise sur son site Web. Cette désignation "repose sur une incompréhension fondamentale de notre activité (...) elle risque de protéger ces mêmes monopoles que la loi entendait contester", a-t-elle ajouté.

Des démarches attendues

Les groupes concernés avaient jusqu'à ce jeudi pour former un recours. La Commission européenne n'a pas souhaité faire de commentaire. Un responsable européen s'est cependant dit "confiant" sur le fait que tous les groupes s'activaient pour être en conformité avant le 6 mars. "Les entreprises contestent en justice, mais en même temps elles font le nécessaire pour respecter la loi", a-t-il expliqué, sous couvert de l'anonymat.

Le DMA va notamment imposer l'interopérabilité avec des services concurrents et faciliter la désinstallation d'applications préinstallées. Il contraindra par exemple Apple à autoriser d'autres boutiques d'applications que l'Apple Store sur ses célèbres iPhone ou iPad. Il interdira tout favoritisme dans les résultats des moteurs de recherche, un reproche qui a notamment été fait à Google en faveur de son site de vente en ligne Google Shopping. "Il est normal qu'il y ait ces appels, c'est même sain, cela montre qu'on est dans un État de droit", a commenté Alexandre de Streel, codirecteur du groupe de réflexion Center on Regulation in Europe (Cerre).

"Quand on est au début d'une nouvelle législation, il y a des incertitudes qui doivent être clarifiées", a-t-il expliqué. "Je ne suis pas surpris qu'il y ait deux ou trois contestations maintenant, mais je pense qu'on en aura encore plus ensuite quand il s'agira de déterminer l'interprétation de telle ou telle obligation".

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