« Voix en exil » : pour les journalistes et les médias en exil
Agir pour les journalistes et médias en exil.
Le nouveau projet « Voix en exil » soutient et accompagne les journalistes et médias en exil. Nous l'annoncions dans La Matinale de lundi 22 septembre, allons plus loin...
Financé par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, le programme est mené par le consortium de quatre partenaires : Canal France International (CFI), Singa, la Maison Des Journalistes (MDJ) et Reporters sans Frontières (RSF). « C’est un projet ambitieux », exclame Thierry Vallat, directeur général de CFI (filiale de France Média Monde). « Le départ d’un journaliste est une victoire pour leur pays d’origine. Pour eux, c’est une défaite. Pour la France, c’est une opportunité », ajoute-t-il.
La première promotion regroupe 18 journalistes pour un programme qui s’étend sur une durée de six mois. Parmi ces participants, on retrouve des journalistes originaires de huit pays : Égypte, Syrie, Afghanistan, Haïti, Iran, Biélorussie, Nouvelle-Guinée et Tunisie. « Nous voulons faire de Paris la capitale de la défense des médias, de la liberté de la presse, et de la lutte contre la désinformation », explique le directeur général de CFI. Antoine Bernard, directeur, plaidoyer et assistance de RSF, considère : « les journalistes sont des antidotes à la désinformation, à la propagande, aux ingérences étrangères malveillantes. Les journalistes, exilés arrachés à leur pays, doivent être soutenus par solidarité, mais également parce que c'est notre intérêt commun. » La mission est de les aider à monter en compétences et s’adapter au marché local ainsi qu’à la France. Le projet répond au besoin : continuer à être journaliste en étant en exil.
« Une voie pour continuer notre travail de journaliste »
Halima Karima, journaliste afghane, est exilée en France depuis 2022. Elle fait partie de la première promotion de « Voix en exil ». Aujourd’hui, elle travaille pour Guiti News, média indépendant, porté par des journalistes réfugiés et français. « Venir dans un pays où vous ne parlez pas la langue, vous ne connaissez pas la culture et vous ne savez pas quoi faire. C’est très difficile », se confie-t-elle. Pour la première fois, elle se retrouve toute seule sans sa famille ni ses amis. Elle se remémore le moment où son chef éditorial lui a annoncé : « Les talibans sont déjà à Kaboul. Tu dois rentrer chez toi. » Pendant six mois, elle s’est cachée avec sa famille dans une ville à côté de Kaboul. Grâce à un visa spécial pour les journalistes, elle a pu quitter le pays avant que d’autres ne soient contraints d’attendre en Iran ou au Pakistan. « Je n’ai pas pu dire au revoir à mes amis et à mes parents. C’était un cauchemar. Ma vie a changé en une seconde », raconte la journaliste. La journaliste afghane a appris le français en 11 mois. « Au début, je ne comprenais rien et je ne parlais pas un seul mot de français », se souvient-elle. Pour elle, ce programme est une véritable opportunité : « Cela ouvre le chemin et crée des liens avec d’autres médias que nous ne connaissons pas. C’est une voie pour continuer notre travail de journaliste. »
Des actions multifacettes
Le programme cherche des journalistes qui ont un projet et ambitions dans le domaine médiatique et les soutenir à le mettre en œuvre. « À leur arrivée en France, les barrières se forment. La langue est un des principaux problèmes à surmonter. Et surtout, comment continuer à exercer son métier et quels soutiens peuvent être trouvés en France pour demeurer journaliste », Darline Cothière, directrice générale de la Maison Des Journalistes. Le premier rôle de ce consortium est de leur offrir un toit mais aussi à contribuer à leur sécurité et insertion socioprofessionnelle. Les « Voix en exil » seront accompagnés avec un soutien psychosocial. Toute l’équipe est mobilisée pour les accompagner et les mettre en réseau avec les partenaires médias. Le programme cherche aussi à leur fournir une sécurité numérique mais également physique et à défendre la liberté d’expression. Les journalistes auront des mentorats, des formations ainsi que des subventions pour leur projets.
La Gaîté lyrique sera également un incubateur des médias. L’endroit est une éclosion de « projets créatifs, interculturels, inclusifs ainsi qu’il se tourne à la production et hospitalité de nouveaux médias », explique Benoît Hamon, directeur général de Singa. Ils organiseront des conférences, des masters class, des rencontres auprès de rédaction ainsi que les sensibiliser au nouveau format des médias en France pour les journalistes exilés avec un savoir-faire. Ils pourront ainsi prendre contact, trouver un réseau avec les rédactions ou créer un média pour celles et ceux qui font ce choix.