« La fidélité ne s’achète pas » - Jean-Paul Mochet (Prosol/Grand Frais)

JeanPaul Mochet et Charlotte Bricard

Quand il parle d’IA, de Data, de transferts d’émotions et de prix sincères, le président de Prosol ne mâche pas ses mots.

Mercredi 12 mars dernier, pendant le salon One-to-One Retail E-commerce à Monaco, nous avons assisté à la conférence de Jean-Paul Mochet, Président Directeur Général de Prosol (Grand Frais, Mon Marché.fr…). Morceaux choisis.

Le commerce, c’est la vie

« Le commerce, c'est la vie. Dans le commerce s'expriment l'entre-soi, le tiers-lieu, la relation à l'autre, les acteurs économiques, l’architecture urbaine, etc. Et c'est ce qui m'intéresse, fondamentalement, dans le commerce. »

Un juste prix, c’est un prix sincère

 « Un juste prix, c’est un prix sincère pour un produit. La sincérité est la chose qui s’est le plus perdue dans le commerce. Une pomme que je prends sur un pommier restera un produit tant que je ne mets pas de prix dessus. C’est la différence avec une marchandise. Le point de bascule est fort quand le prix est plus important que le produit. Et c’est un peu ce à quoi on assiste aujourd’hui dans le commerce alimentaire. Il y a plus d’importance sur le prix, plus de communication sur le prix, plus d'artifice sur le prix avec les bons de réduction, etc. (…/…) Chez Prosol, nous avons plus d’attention à faire des heureux que des euros. Et quand on fait des heureux, on fait des euros. »

Notre métier premier, c'est l’amont 

« Prosol, depuis 35 ans, met toute son énergie au service du produit accessible. Nous sommes une entreprise qui sélectionne, valorise, et vend des produits de qualité et d’origine reconnus. Notre métier premier, c'est l’amont. Nous sommes plus proches de la bonne production que de la distribution. On est le point d'ancrage entre le « bien produit » et le « bien consommé ». Nous le faisons auprès de 700 producteurs français, avec lesquels on parle en direct et on a tissé des liens extrêmement forts. Nous achetons leurs produits avec un cahier des charges particulier. Nous modifions aussi ces produits. Nous transformons beaucoup. Nous transportons avec une logistique 2.0. Par exemple, la salade que vous trouvez dans les magasins Grand Frais a été, la plupart du temps, ramassée la veille. »

Les indicateurs de succès

« Les seuls indicateurs qui circulent dans l’entreprise, auprès de l’ensemble des collaborateurs, ce sont les indicateurs de satisfaction. Le premier indicateur, c’est la fréquentation. Ce qui nous intéresse, c’est de savoir combien de clients ont passé la porte du magasin. Le deuxième indicateur de satisfaction est le NPS, et nous sommes 10 points au-dessus du meilleur en France. Et après, bien évidemment, c'est notre capacité à déployer ce que les gens aiment ».

Les transferts d’émotions

 « On vient aussi pour tout ce qui ne se vend pas, et ça reste vrai plus que jamais. On vient par exemple pour un transfert d'émotions. Quand vous allez chercher un paquet de lessive, vous dites-vous que vous allez trouver autre chose qu’un paquet de lessive ? A priori non. Vous pouvez trouver cette émotion dans un regard, dans un échange, dans un conseil. Vous achetez des topinambours, vous ne savez pas comment les préparer. Et vous avez quelqu’un de sympathique qui vient vous expliquer comment les cuisiner. Ça, ça ne se vend pas, mais c'est le petit plus qui fait la différence. Je trouve qu’aujourd'hui, les émotions, en général, sont passées au tamis du prix ».

La fidélité ne s’achète pas 

« J'ai une conviction très forte : la fidélité ne s’achète pas. Beaucoup de retailers devraient l’entendre et en faire une maxime propre. La fidélité, c'est une preuve d'une relation accomplie. Et donc, tout est dans la relation. Ça ne veut pas dire qu’on ne s’intéresse pas à mettre en place un programme relationnel dans nos enseignes. L’avenir montrera qu'on est capable de le faire avec brio. Mais avec la volonté de continuer d'être le continuum du transfert d'émotions. Quand on rentre dans un magasin Grand Frais, en général on fait « waouh » la première fois. Je veux du waouh dans l'app. Comme par exemple la capacité de faire une recette chez soi, en couple, en même temps, chacun en la suivant sur son portable avec son propre parcours dans la recette. »

La data nous sert à conserver notre bon sens 

« Derrière notre métier presque de paysan, se cache une entreprise qui est extrêmement connectée à la data, qui utilise l'IA dans plein de domaines. Et la data, c'est notre cœur de réacteur, pour analyser, pour personnaliser, pour performer…. On l’utilise par exemple pour raccourcir les délais entre la sortie de terre et l’entrée dans le dépôt. La data nous sert à conserver notre bon sens. »

L’IA restera invisible dans nos magasins

« L’IA restera invisible dans nos magasins. Nous n’ajouterons pas d’écrans. L’IA participe à améliorer la productivité pour simplifier les tâches les plus répétitives. Elle permet d’avoir du « personnel augmenté ». Elle permet la personnalisation. Elle nous permet par exemple, de créer des algorithmes pour mieux affiner nos fromages. »

L’avenir du retail

« Je vous ai beaucoup parlé de sincérité. Je pense que l'avenir du retail, c'est de la sincérité avant tout. (…/…) Le retail devrait davantage s'intéresser à l’offre et à la manière. Ce qu’on met dans l’offre et la manière dont on vend, notamment le transfert d’émotions. »

« Chez nous, trois mots tournent en boucle : sincérité, plaisir et audace. C’est peut-être cela le retail de demain. »

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