Julien Féré (SNCF) : « Le danger du sujet RSE, est qu’il est très à la mode»
Le directeur de la communication Voyages chez SNCF répond à nos questions à quelques jours de l’événement de « Impact. Le point sur la RSE » organisé le 7 mai par CB News et Havas Media et dont SNCF est partenaire.
CB News : Comment les politiques RSE doivent-elles s’inscrire dans la communication des marques ?
Julien Féré - Vous vous souvenez du slogan des frites Mc Cain dans les années 90 « C’est ceux qui en parlent le moins qui en mangent le plus » ? Jusqu’à peu, au sein de Voyages SNCF, nous étions assez convaincus par cet adage en la matière. Nous ne voulions paraître ni opportunistes, ni imprécis. Mais les choses ont changé. D’abord car il s’agit de répondre à l’intérêt, voire l’engouement des Français pour ces sujets. Et puis aujourd’hui, nous avons des chiffres, des éléments tangibles à partager, notamment grâce à l’étude conduite avec l’ADEME pour comparer les émissions de GES des différents moyens de transport. Nous avons mis en place un programme commun à toutes nos marques : Ouigo, INOUI, et Intercités : « Planète Voyages » et avons ajouté un pilier vert à chacune de nos plateformes de marque. Le tri des déchets à bord, la recherche du meilleur type d’énergie sont des réalités depuis longtemps, nos arguments sont les mêmes, mais la façon de les délivrer a changé. Ils doivent désormais s’inscrire dans nos outils de communication, nos créations publicitaires par exemple, reprennent ces éléments, avec un fonds commun mais une forme propre à chaque marque : un ton, un humour, une patte, une DA très différente. De sorte que ce qui semble être une nouvelle donne n’apparaisse pas comme une verrue mais bien une extension naturelle de nos territoires de communication.
CB News- En tant que directeur de la communication, comment gérez-vous l’ensemble des points sur lesquels peuvent s’exprimer vos engagements RSE : le fond des messages, la diversité des castings, l’impact carbone de vos plans médias, … ?
Julien Féré - Nous avons un cahier des charges très strict, qui prend en compte les politiques RSE mais aussi la gestion des ressources humaines des agences avec lesquelles nous travaillons. Cette dimension compte pour un quart de leur note globale en compétition. Nous veillons bien sûr à la notion de diversité dans nos castings, non seulement pour être en accord avec un principe de représentativité, mais aussi par souci de modernité. Nos agences média quant à elles, font une grosse part du travail, en veillant à ce que nous travaillons avec des régies s’engageant à utiliser des encres Imprim’Vert, du papier recyclé, comme c’est le cas pour les cartes du bar de nos TGV INOUI. Côté production, nos campagnes sont certifiées 100 % made in France depuis 2018. C’est une somme de petits détails qui s’additionne avec beaucoup d’humilité, dans une démarche d’amélioration continue, tout en ayant conscience que nous ne sommes pas dans une position d’exemplarité.
CB News- Quel est l’enjeu en matière de RSE pour vous aujourd’hui ?
Julien Féré - Aujourd’hui il nous appartient de construire des preuves de nos engagements. Les événements comme cette matinée y participent. Le danger de ce sujet, de la RSE, est qu’il est très à la mode. Cela peut donner l’impression que nous partons de zéro, que nous en sommes aux balbutiements de nos efforts, ce qui est loin de la réalité. Au sein de la SNCF par exemple, la rénovation des trains, qui ont plus de 30 ans de durée de vie, est un sujet qui mobilise l’entreprise depuis toujours, tout comme l’éco conduite que l’on retrouve au cœur de nos outils de com interne dès les années 60. Le réel impact de notre politique de développement durable se mesure par les progrès déjà réalisés sur l’exploitation de nos trains, que ce soit en matière de durabilité, de recyclabilité, de gestion des déchets, et sur le sujet de l’énergie qui est notre deuxième grand chantier. La communication doit agir comme un révélateur.
Sur ce sujet plus que sur tout autre, il est essentiel aujourd’hui de ne pas être le seul émetteur de nos messages. Ils doivent être relayés en externes, par des leaders d’opinions, des associations, des influenceurs, des partenariats vertueux comme celui que nous avons mis en place avec le navigateur François Gabart par exemple. En s’associant à sa quête d’une voie « plus verte » pour la voile, nous donnons du souffle à nos engagements pour le train. Et ce qui est valable en externe doit l’être encore plus en interne. Le mieux placé pour vous dire que voyager en TGV INOUI, c’est émettre 50 fois moins de CO2 qu’en voiture et 80 fois moins qu’en avion, c’est encore le chef de bord.