Peurs sur la com, la fin d’un monde ou le début d’un nouveau ?

Peurs sur la com n’est pas un livre de publicitaire comme les autres.

Son auteur Olivier Breton n’égrène pas les cas de son agence en se félicitant d’avoir une méthode infaillible. Ce sont plutôt les confessions d’un publicitaire qui analyse les enjeux de notre métier, de notre société. Avant, on disait publicitaire maintenant, on dit communicant.

Comment vous présenter Olivier : passionné d’Europe et d’histoire, il fut enseignant en philosophie et en lettres, chercheur, journaliste, éditeur, patron de Verbe et VP de Publicis Consultants de 2004 à 2008. Aujourd’hui il dirige une enseigne historique de notre métier : Image & Stratégie (I & S). C’est « l’honnête homme » de la publicité qui réunit régulièrement autour de conférences, des professionnels de tous horizons pour faciliter les échanges.

Il fait le constat que la com n’apporte plus de valeur aux marques ou à la société. La communication traverse une crise existentielle et ses acteurs éprouvent un sentiment de déclassement (79 % jugent leur métier moins attractif *)

Cette peur est paradoxale car, elle arrive à un moment où la com semble être le moteur de toutes les décisions mais, ce ne sont plus les communicants qui sont au centre du jeu.

Olivier liste les raisons d’avoir peur et elles sont nombreuses. Il dénonce les réseaux sociaux et la marchandisation de l’attention, pointe le développement des technologies qui mettent en avant les métiers de l’ingénierie et de la data vs les métiers de stratège sans parler de l’IA qui fragilise un modèle déjà en difficulté.

Les peurs sont nombreuses mais, pour l’auteur elles ne doivent pas nous amener à baisser les bras. Il ne s’attarde pas trop sur les constats pour définir des ambitions pour nos métiers.

L’urgence est de co-construire une communication efficace responsable et éthique.  La communication a une responsabilité sociale. Elle doit nous aider à redonner du sens à nos actions et porter une dimension politique forte. Le sous-titre du livre est : « la fin d’un monde » j’aurais plutôt écrit Manifeste pour un nouveau monde, tel qu’Olivier l’appelle de ses vœux. Un monde où la publicité dynamise une société qui doit sortir de son état de sidération. Je ne peux m’empêcher de faire le lien avec mon expérience CLM/BBDO. Faire des films avec des hommes habillés en jupes pour Eram, des consommateurs qui chantent dans un supermarché pour une marque de papier toilette illustre la vision politique de Philippe Michel qui portait cette ambition de faire avancer la société, d’enchanter la consommation et le monde.

Après le vote de la loi Pacte on a tous souhaité que le travail fourni sur la raison d’être qui avait permis aux entreprises d’intégrer l’utilité et la responsabilité sociale était un premier pas vers la construction d’un nouveau monde.  Un monde où la communication crée du lien, nous aide à faire société. Tout le monde se lève pour Danette et pour ce nouveau monde.

Ce livre est un exercice intellectuel salutaire que beaucoup de professionnels d’autres domaines devraient faire car ils partagent le constat que nous vivons la fin d’un monde... Ce sentiment est accéléré par les événements politiques récents. Nous devons gérer cette transition et surtout imaginer le monde de demain.

Un livre qui fait du bien pour tous ceux qui ont choisi ce métier et qui aujourd’hui préfèrent déclarer qu’ils sont pianiste dans un bordel plutôt que stratège dans la pub.

Il propose un diagnostic complet de la situation et dresse des pistes de mise en œuvre d’un renouveau de nos métiers.

Les magazines professionnels peuvent s’engager et être les fers de lance de ce renouveau. En créant des espaces de débat, d’échange pour embarquer l’ensemble du marché dans une ambition commune.

Espérons que ce livre sera l’étincelle de cette transformation.

* : Sondage Viavoice 2025