Valeurs Actuelles débouté de son action contre le CDJM
Le tribunal de Paris a débouté Valeurs actuelles, qui avait assigné en référé le Conseil de déontologie journalistique et de médiation (CDJM), auteur d'un avis défavorable sur un article de l'hebdomadaire représentant la députée LFI Danièle Obono en esclave, a-t-on appris vendredi. Le magazine avait attaqué cette instance indépendante pour "atteinte à la présomption d'innocence" après la publication en novembre d'un avis du CDJM qui jugeait l'article de Valeurs Actuelles "contraire" à la "déontologie journalistique". Valeurs Actuelles avait publié en août 2020 un récit de sept pages de "politique fiction", dans lequel la députée Danièle Obono, à la peau noire, "expérimente la responsabilité des Africains dans les horreurs de l'esclavage" au XVIIIème siècle, selon sa présentation par le magazine. Des dessins de Mme Obono, collier en fer au cou, accompagnaient l'article. En plaçant Danièle Obono "dans une situation dégradante", le récit de Valeurs actuelles "ne respecte pas la dignité humaine et est susceptible de nourrir les préjugés", avait estimé le CDJM, saisi par un lecteur. Déjà visé par une enquête préliminaire du parquet de Paris pour "injures à caractère raciste" et par une plainte de la députée, l'hebdomadaire estimait que l'avis du CDJM affirmait "publiquement" la "conviction de sa culpabilité". Il réclamait son retrait.
Mais pour le tribunal de Paris, l'analyse du CDJM "ne peut être" assimilée à "une déclaration péremptoire de culpabilité d'Erik Monjalous", le directeur de publication de l'hebdomadaire, selon l'ordonnance de référé rendue jeudi, consultée par l'AFP. M. Monjalous a ainsi été débouté de ses demandes et condamné à verser 2.000 euros au CDJM. "C'est une bonne nouvelle pour la liberté de la presse et pour la démocratie", a réagi auprès de l'AFP le président du CDJM, Patrick Eveno. "C'est aussi une très bonne nouvelle pour le CDJM parce que cela va faire taire quelques oppositions", a-t-il ajouté, alors que le syndicat des éditeurs de la presse magazine (SEPM) a soutenu Valeurs actuelles dans ce litige. De son côté, l'hebdomadaire réfléchit aux suites à donner à la décision du tribunal, a indiqué à l'AFP le directeur adjoint de la rédaction, Tugdual Denis. "On ne reconnaît absolument aucune légitimité" au CDJM, a-t-il ajouté.
Le CDJM a été fondé en décembre 2019 par des journalistes, des médias et des représentants du public après des années de débats sur l'utilité d'une telle instance, et malgré le refus de nombreux éditeurs de presse et rédactions d'y adhérer. Sur le modèle d'institutions semblables en Europe, il peut servir de médiateur ou d'arbitre entre le public, les médias et les rédactions pour aider à combler la défiance entre journalistes et citoyens.