Patrice Begay (Bpifrance) : "On a plus que jamais besoin de l’événementiel pour reconstruire le monde d’après"

Patrice Begay

Le confinement s'étire et CB News poursuit ses rencontres avec les acteurs du secteur de la communication. Rendez-vous aujourd'hui avec Patrice Begay, directeur exécutif et directeur de la communication de  Bpifrance .

Parmi les secteurs suivis par BpiFrance l'événementiel est l'un des plus touché ? Quel est le bilan ?

Depuis le 16 mars, le monde s’est arrêté de respirer. La crise a d’abord touché de plein fouet le secteur événementiel avec l’annulation en cascade et de manière foudroyante de tous les événements. Le secteur événementiel s’est retrouvé ni plus ni moins en arrêt cardiaque : 400 000 emplois directement touchés. Dans les agences, bien sûr, mais aussi les théâtres, les salles de spectacles, les prestataires techniques, les traiteurs, les free lance. Le pire est peut-être l’incertitude, puisqu’on ne sait pas quand l’activité va repartir. Dans ce contexte, l’Etat, les régions, les banques, les experts-comptables se sont mobilisés comme jamais dans une union sacrée. L’état et les réseaux bancaires et BpiFrance ont déployé un dispositif permettant à l’État de garantir 300 milliards d’euros de prêts pour soulager la trésorerie des entreprises. Ce dispositif a été mis en place dès le début de la crise et aujourd’hui, nous avons à date plus de 300 000 demandes pré accordées du PGE (prêt garanti par l’Etat). Ce prêt il est fait pour toutes les entreprises, des TPE aux grands groupes. Donc c’est pont aérien de cash pour les entreprises.

Comment peut-on  aider ce secteur à retrouver une voie de croissance ?

La filière événementielle a un rôle social et économique majeur. C’est notre raison d’être. Parce que cette filière permet aux institutions, à l’Etat, aux entreprises de s’adresser à leurs publics et d’engager leurs relations. L’événementiel rapproche les gens, les cultures et génère de l’engagement, tout comme le sport. On a donc besoin de l’événementiel plus que jamais pour reconstruire le monde d’après. En réalité je préfère parler de nouvelle histoire et l’événementiel  a cette capacité de relance de l’économie. Maintenant, nous devons tous être agiles, savoir ajuster nos priorités, créer de nouvelles mesures d’accompagnement à la transition. Donc il est important, même en temps de crise de faire le bilan de ses actions, de réfléchir à demain, de penser à se réinventer. Il y a des gens qui attendent une bouée, il y a ceux qui ont commencé à nager. Il faut travailler sur cette nouvelle France, plutôt que la défense des acquis. Le monde de l’événementiel doit à la fois tenir et bâtir. Pour créer une nouvelle histoire avec les agences, les clients, les partenaires, les prestataires, avec les institutionnels. Il faut réunir toutes les professions de la filière pour réinventer le métier.

Concrètement que peuvent faire les pouvoirs publics ?

Aujourd’hui, ce qui est fait par le gouvernement, le PGE, le chômage partiel, c’est unique au monde. Cela fait plus de six semaines que les agences travaillent d’arrache pied pour se sortir de la crise, pour se transformer à vitesse grand V et qui ne se contentent pas des aides de l’Etat. Aux autres, je leur dis de faire attention aux demandes ego centrées sans aucune piste de transformation, d’adaptation, à l’incompréhension face aux changements irréversibles que provoque cette crise. Les restaurateurs, les coiffeurs, les agents immobiliers, les coiffeurs se mobilisent pour organiser le déconfinement tout en demandant un accompagnement. Certains acteurs de l’événementiel ne savent malheureusement que chiffrer leurs pertes potentielles. Moi je suis plutôt pour que l’on mette en place un véritable plan Marshall de la filière événementielle en proposant l’exonération des charges patronales jusqu’à la fin de l’année. Ce sont des demandes d’agences qui proposent également la prolongation sur 18 mois du dispositif d’activité partiel. Il demande également l’allongement à 18 mois du délai de remboursement du PGE. Vient ensuite la mise en place d’un dispositif législatif permettant le maintien des engagements des différentes parties en cas de report d’un événement. Depuis le 15 mars, j’appelle tous mes confrères annonceurs à ne pas annuler leurs événements mais à les reporter. Et si cela n’était pas possible, il faut convertir les événements en digital. Je suis également favorable à la proposition d’Aurore Bergé d’instaurer un crédit d’impôt pour les annonceurs ce qui soutiendrait les médias. Pour moi ce crédit d’impôt sera un véritable soutien à la relance tout en aidant au redémarrage des secteurs des médias dont certains sont en danger.

Y a-t-il des initiatives concrètes à prendre ?

Aujourd’hui, l’urgence est de travailler main de la main avec pouvoirs publics et les autorités sanitaires pour mettre en place de nouvelles normes de sécurité pour les événements. Ce qui est le plus important c’est que ce travail soit fait en commun, que tous les métiers, le sport, le tourisme, les congrès etc. s’unissent. C’est aussi l’inventivité et l’imagination qui permettra de redémarrer. Le groupe MK2 travaille ainsi à réhabiliter le concept américain des drive-in ou l’on allait au cinéma sans sortir de sa voiture, concept que l’on pourrait adapter également au sport. Dans un autre domaine, l’agence Win-Win vient d’organiser le premier e-congrès ce en multiplex live pour le compte de la Société européenne de réanimation (ESICM). Au total 55 000 personnes de 160 pays y ont participé et ont  écouté 24 intervenants. Nous-mêmes, Bpifrance avons organisé depuis le début de confinement plus de 80 événements online qui ont regroupé plus de 15 000 personnes. Dans un autre registre, le producteur de spectacle Philippe Delmas a mis au point un système de spectacle interactif sur scène. C'est en inventant que l'on s'en sortira.

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