RGPD, personnalisation… Quelles seront les grandes tendances du marché de la publicité en 2020 ?
L’année 2020 sera clé pour le marché publicitaire : les possibilités de personnalisation sont de plus en plus nombreuses, cependant le contrôle sera plus strict sur l’application du Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD). Alors que le RGPD est désormais en vigueur depuis plus d’un an et demi, Marie-Laure Denis, présidente de la CNIL, soulignait dans une récente prise de parole « l’insuffisante conformité des acteurs du marché sur le sujet des cookies ». Cette déclaration complète les recommandations dans l’application de la législation en vigueur, en amont de la consultation qui se terminera fin février.
Le législateur propose donc plus de souplesse dans le nombre de publicités et leur personnalisation mais va être plus exigeant avec les acteurs du marché dans l’application du RGPD.
Un terrain de jeu plus vaste pour les régies mais des règles du jeu plus strictes et dominé par Facebook et Google
Les inventaires publicitaires sont de plus en plus larges mais touchant de moins en moins de personnes : l’adblocking concerne plus d’un tiers des internautes, la technologie cookie en déclin compliquant le ciblage et l’application du RGPD ont fait évoluer les activités des régies.
Ainsi, lorsque le ministre de la culture annonçait en septembre dernier une libéralisation du marché publicitaire ; il semble normal que des garanties supplémentaires pour les utilisateurs finaux soient mise en contrepartie dans la balance.
Ce contexte n’est pas neutre pour les régies, l’application du RGPD a paradoxalement renforcé l’hégémonie de Google et Facebook, notamment lié aux budgets et équipes que les deux géants du web ont alloués pour appliquer le RGPD pour et auprès de leurs clients. Par ailleurs, la disparition des cookies force les régies à adapter leurs offres (avec de la publicité contextualisée, par exemple).
Des mesures pour contrer les dérives récentes :
Après des années pré-RGPD de “far west” de la donnée (optin par défaut, récupération de données pour des usages non clairement explicités aux utilisateurs et autres pratiques désormais hors la loi), une période de transition était nécessaire tant pour les régies que pour les utilisateurs pour appréhender les contours de la législation.
Car il faut le reconnaître, faute de recommandations claires et précises les acteurs du marché ont appliqué le RGPD avec leur vision du texte et en fonction de leurs enjeux business (maximisation du taux de consentement et activation de scripts de collecte “nécessaires” au bon fonctionnement des régies).
La résultante de ce volte-face réglementaire et le manque de consignes de l’application de la loi est la mise en place de dark patterns (à différentes échelles) pour faciliter des consentements :
Tout est fait pour maximiser le consentement des utilisateurs en jouant sur les biais cognitifs humains. Sur l’exemple ci-dessus, nous pouvons observer différents jeux de couleurs, ainsi qu’un manque de clarté sur l’effet du bouton OFF/ON pour chaque ligne de consentement.
C’est une des dérives mise en avant dans le rapport de la CNIL qui encourage désormais une présentation plus neutre des modules de consentements pour encourager la libre prise de décision des utilisateurs.
Quel avenir pour le poste de Délégué à la Protection des Données (DPD) ?
Le DPD voit son rôle renforcé dans cette conjoncture. La libéralisation et l’élargissement de l’inventaire publicitaire à des canaux encore inexplorés (Télévision pour la publicité adressée par exemple) génère de nouveaux traitements de données personnelles entre de multiples acteurs (FAI, régies, producteurs de contenus) afin de pouvoir proposer cette offre en conformité avec la législation.
D’autre part, la prise de position de la CNIL et les recommandations livrées en amont de la consultation mettent en exergue l’impératif d’une mise en conformité rapide d’un grand nombre d’acteurs du marché. Et ce ne serait-ce que pour s’aligner avec les dernières recommandations.
La roadmap des DPD semble ainsi bien chargée pour cette année !
L’année 2020 sera une année charnière pour la publicité : l’ouverture de la publicité TV adressée, les nouvelles recommandations de la CNIL, la domination de Facebook et Google et la prochaine disparition des cookies tiers vont obliger le marché à changer rapidement.
Le changement ne sera peut-être pas pour le meilleur, en ce qui concerne le bien du consommateur. En effet, de nouvelles méthodes de tracking risquent de voir le jour, permettant un suivi pérenne des individus. Nous pouvons par exemple penser à la connexion sur le navigateur Google Chrome, qui permet au géant du web de logguer l’ensemble de nos visites et activitées en ligne, ou encore à la mise en place de processus d’identifications dans le local storage, recoin caché du navigateur qui n’est pas encore sous le feu des régulations.
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