Jean Michel Jarre : "j'ai composé l'identité sonore de HSBC comme une musique de film"
Jean-Michel Jarre était à Cannes, la semaine dernière pour présenter, la nouvelle identité musicale de la banque HSBC qu’il vient de signer. Un projet hors norme à l’image de l’œuvre du pape de la musique électro. CB News l’a rencontré à cette occasion. Interview exclusive.
Comment avez-vous été amené à travailler avec HSBC ?
Quand MLA (My Love Affair, agence de brand entertainment) qui m’a présenté le projet, j’étais intrigué parce qu’il ne s’agissait pas simplement de faire la musique d’une campagne de pub mais de réfléchir à une identité sonore. J’ai rencontré ensuite les gens de HSBC et on s’est tout de suite bien entendu par rapport à ce qu’ils souhaitaient. Ils avaient une nouvelle identité visuelle et ils voulaient porter un nouveau message. Et dans ce cet esprit ils voulaient une identité sonore à 360 degrés qui puisse s’appliquer aussi bien à un jingle qu’à un morceau de 20 ou 30 minutes.
Comment avez-vous procédé ?
J’ai approché le sujet comme pour une musique de film, ce qui n’est pas la manière de faire habituelle dans ce domaine. Il s’agissait d’imaginer une musique qui puisse se décliner dans différentes situations, dans différents territoires. Il me fallait donc créer un thème et des couleurs sonores. C’est la différence avec des gens qui font des sound library, qui font de la musique au mètre, en quelque sorte. Une individualité, ou un artiste, va approcher un projet avec sa subjectivité, ses a priori et donc avec un son instantanément reconnaissable. C’est le but dans un monde où nous sommes bombardés de sons et d’images. La question était donc : "qu’est-ce que c’est, le son de HSBC ?"
Et quelle est la réponse ?
J’ai été touché par le fait qu’il ne se définissait pas seulement comme une entité bancaire mais comme une société qui avait d’autres ambitions, notamment dans le domaine de l’éducation. Ce qui était également important pour moi, c’est leur lien avec l’Asie. J’ai une histoire personnelle avec la Chine puisque j’ai été le premier musicien occidental à y jouer à l’époque de Mao. J’y suis retourné dans un cadre exceptionnel puisque j’ai été le seul artiste à jouer à la fois dans la Cité Interdite et sur la place Tien an men. Il fallait donc que le thème soit déclinable sur le plan occidental et qu’asiatique. Il fallait également qu’il puisse être joué aussi bien dans un stade dans un style plus électro, que d’une manière plus orchestrale ou avec une tonalité plus asiatique, justement, sans tomber dans le folklore. C’est pourquoi je l’ai pensé comme une musique de film avec des scènes et des scénarios différents. Cette approche m’a aussi permis de résoudre le problème des aéroports où vous pouvez être en contact avec la musique sur une durée très longue. Si vous mettez une boucle, cela devient très vite insupportable. C’est pourquoi j’ai développé un thème qui s’étire, qui est presque caché pour permettre une écoute sur la durée.
Les responsables de HSBC avaient une attente particulière ? Des exigences ?
Pas du tout. Il n’avait qu’une idée très vague de ce qu’ils voulaient. Ils savaient simplement qu’il fallait qu’il y ait une cohérence avec le nouveau logo et la nouvelle identité visuelle de la marque créee par Saatchi & Saatchi. Ce qui était également important, c’est que la musique illustre la nouvelle signature, "Together we thrive" qui fait allusion à un mot chinois que veut signifie "prospérer dans le temps". C’est ainsi que le jingle prend son temps. Au lieu d’avoir un thème ultrarapide, comme je l’ai fait pour France Info, j’ai fait l’inverse. Tous ses paramètres là m’ont beaucoup amusé et m’ont poussé plus loin.
Vous êtes donc allé du jingle à la composition symphonique ne passant par la musique d’attente ?
L’idée c’est que ce soit adaptable à toutes les situations. C’est compliqué mais ce qui est intéressant, c’est de l’approcher sur le plan mélodique. Il faut un côté émotionnel, mais aussi épique. C’est pour cela que c’est un exercice intéressant.