Nice Matin : les candidats à l'oral
Les candidats à la reprise du groupe Nice-Matin ont passé leur grand oral lundi devant le tribunal de commerce de Nice, qui s'est accordé jusqu'au jeudi 23 octobre pour analyser la viabilité financière et le coût social des offres. A l'approche de cette échéance, deux candidats se détachent, qui se livrent une guerre ouverte: les salariés et le groupe belge Rossel adossé à deux riches investisseurs. L'un des quatre candidats, au projet le moins abouti, a finalement jeté l'éponge lundi à l'issue de son audition et annoncé apporter "son soutien moral" aux salariés. Xavier Ellie, président de la société éditrice de Paris Normandie, du Havre Libre et du Havre Presse, a été applaudi par les 200 salariés rassemblés devant le tribunal, en leur exprimant "toute sa sympathie". Les salariés, qui ont monté une société coopérative d'intérêt collectif (SCIC), ont fortement médiatisé leur candidature depuis août en levant près de 500 000 euros via des dons et une vente aux enchères. Quatre cent salariés ont accepté de verser une partie de leur 13ème mois, permettant de lever 1 million d'euros (sans atteindre les 3 millions espérés). La SCIC a bouclé un plan de financement comprenant en outre sept millions de crédits ou d'aides, néanmoins en attente de confirmation. Enfin, les salariés entendent céder de précieux actifs -une participation de 50% dans Corse-Matin et les murs d'agences locales- pour récupérer de "4 millions à 11 millions d'euros". L'homme d'affaires Bernard Tapie a signé un chèque de 4 millions d'euros pour Corse-matin, ainsi qu'un autre de 1,2 million pour l'achat éventuel d'agences, déposés au tribunal lundi. "On est le Petit Poucet, mais parfois il gagne la Coupe de France", a déclaré à la sortie Jean-François Roubaud, un porte-parole de la SCIC, qui a obtenu le délai qu'il souhaitait pour confirmer certains financements. Nice-Matin est assis sur un appétissant patrimoine immobilier estimé à 25 millions d'euros, puissant levier pour négocier des prêts ou financer le rachat.
La candidature Rossel
Face aux salariés, le groupe de presse belge Rossel (Le Soir, La Voix du Nord, L'Union), associé au spécialiste du BTP monégasque Marzocco et à l'homme d'affaires franco-libanais Iskandar Safa, mettent dans la balance 30 millions d'euros de fonds extérieurs sans hypothéquer des actifs, plus 20 millions d'investissements sur trois ans. En cas de cession, un jour, du patrimoine, "les recettes seraient utilisées au développement de Nice-Matin", assure un responsable du groupe Safa. Bernard Marchant, administrateur délégué du groupe Rossel, a expliqué lundi au tribunal que les coupes dans les effectifs étaient nécessaires pour assurer l'avenir de Nice-Matin "sur le moyen terme". Il veut notamment automatiser l'impression et donner congé à 70% des ouvriers techniques. Dans l'intérim, des équipes du groupe Rossel viendraient en renfort. Dans son avis au tribunal, le comité d'entreprise reconnaît le "professionnalisme" de Rossel, mais dénonce "une lourde purge sociale opportuniste". Rossel a revu à la baisse le nombre de départs (376 soit 37% des effectifs de 1 099) et propose désormais de consacrer 15 millions d'euros au plan social pour offrir des compensations au-delà des obligations légales pour le personnel licencié. Les salariés défendent eux un "projet social d'intérêt général", prônant 159 départs exclusivement volontaires (14,5% des effectifs), entraînant 14 millions d'euros d'économies. Les salariés deviendraient les actionnaires majoritaires et délègueraient la gestion à un directoire (dont le président pressenti est Yann Chappelon, actuel PDG de France Télévisions Distribution). Un dernier candidat, Georges Ghosn, ex-propriétaire de La Tribune et de France-Soir, ne semble pas avoir entièrement convaincu les administrateurs judiciaires, qui ont néanmoins émis des réserves sur toutes les offres. M. Ghosn a présenté un plan prévoyant plus de 11 millions de capitaux, 13 millions d'investissements sur cinq ans, et 239 licenciements.