Haby Niakaté, rédactrice en chef de Brut Afrique est une convaincue de la data

Haby Niakaté, rédactrice en cheffe de Brut Afrique

Haby Niakaté, rédactrice en cheffe de Brut Afrique, le 6 novembre à Abidjan.

(© Dahlia Girgis/CB News)

À la fin de la présentation d’Haby Niakaté au Salon International des Contenus Audiovisuels (SICA) à Abidjan le 6 novembre, une petite file se forme pour discuter avec elle. Sollicitations pour un échange, demande de selfie… La rédactrice en chef de Brut Afrique a séduit son audience, principalement composée de jeunes étudiants, avec son étude de cas “Nouvelles écritures pour de nouveaux formats”. Lancée en 2021, la filiale africaine de Brut comptabilise aujourd’hui en moyenne 80-90 millions de vues sur l'ensemble de ses supports. “Les nouveaux médias comme Brut sont drivés par la data, les statistiques” soutient lors de la conférence l’ancienne journaliste de Jeune Afrique et du Monde. Brut Afrique compte aujourd’hui une vingtaine de journalistes, dont 5 basés au siège de la structure dans la commune de Cocody (Abidjan). En 2024, le Grand Prix des médias de CB News a récompensé Brut Afrique dans la catégorie mouvement stratégique pour un média, et Brut du Grand Prix.

Au quotidien, la rédaction de Brut Afrique s’aide des données pour le choix de ces sujets.  Au sein de l'équipe, une partie est chargée de veiller aux différentes tendances sur les plateformes comme Instagram, TikTok ou encore WhatsApp (qui à part rassemble 1,2 million d'abonnés). Un gain de temps selon la responsable : “nos conférences de rédaction durent 30 minutes maximum”, complétées par des sessions périodiques de "brainstorming" sur les formats. Elle donne deux conseils à ses auditeurs pour qu’un contenu fonctionne : bien choisir les sujets à l’aide de la data et avoir de belles images. Pour le second, “le reach peut varier du rien au double”, précise la journaliste.

Plateformes et codépendance

Chaque journaliste a sa plateforme de travail attitrée. Il s'y s’adapte en permanence.  Une personne est également dédiée aux échanges avec les plateformes. “Si nous sentons en interne que l’algorithme évolue, cette personne se renseigne auprès de la plateforme concernée”, explique Haby Niakaté autour d’un café avec CB News. Selon elle, des plateformes comme Meta (Instagram, Facebook, WhatsApp) sont plus ouvertes à la discussion, à l’inverse de TikTok (ByteDance). “Il est possible que nous soyons un marché moins prioritaire pour certaines”, suggère Haby Niakaté.

Un média dépendant des plateformes ? En partie vrai pour la rédactrice en chef. Pour réduire une possible dépendance, elle met en avant l’ouverture de nouveaux supports où se déployer comme Threads, Twitch… À noter également, Brut a réuni l’ensemble de ces vidéos sur son propre site. “Les plateformes dépendent également de nous, car ils ont besoin d’avoir des contenus fiables et de qualités.”

Tester et ajuster

La data est en partie à l'origine de la naissance de Brut Afrique. La maison mère avait constaté, à travers ses statistiques, la présence d’un large public consommateur de ses vidéos dans le continent africain. Après avoir vécu quelques années en région parisienne, Haby Niakaté décide en 2016 de s’installer dans la capitale de la Côte d’Ivoire, Abidjan. Elle arrive avec un projet en tête : “lancer un média comme AJ+ ou Brut qui n’existe pas encore en Afrique”, confie-t-elle. Accompagnée d’un autre créatif, elle inaugure une boite de production intitulée Ojiii. Mais les difficultés de financement mettent un terme à la jeune entreprise. Lorsque en 2021 Haby Niakaté entend parler de l'ouverture du poste chez Brut Afrique, elle fonce. La franco-malienne rêve toujours d’un média “décomplexé et jeune” dans le continent. Pari réussi. La marque rassemble 42% de 25-35 ans au premier semestre 2024. Ses plus gros marchés sont la Côte d'Ivoire, le Maroc, la France, le Sénégal, le Burkina Faso ou encore le Cameroun.

Mais le format a évolué. En 2021, Brut Afrique est inauguré avec ses antennes locales comme en Tunisie et au Sénégal. Une idée soutenue par la direction de Brut, mais qui ne fonctionne pas. “La différence culturelle entre les pays africains est une idée très défendue par la diaspora, mais nous avons un terreau commun qui est le panafricanisme”, explique la trentenaire. Pour éviter “de hacher les audiences”, la direction supprime en 2023 les antennes nationales pour ne garder qu’un canal commun. Là encore, la data confirme cette restructuration avec une hausse marquée des audiences : le pourcentage de vue sur toutes les plateformes de contenus a augmenté de 61% entre mai et juin 2023 . La rédactrice en cheffe préfère explorer dans le futur des “Brut Afrique anglophone, lusophone, arabophone…”.

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