Chronologie des médias : Disney+ conclut un accord avec les professionnels
Le changement était dans l’air, mais longtemps incertain. Dans un communiqué mercredi, le groupe Disney a ainsi officialisé la signature d’un accord de 3 ans sur le financement et la diffusion de la création cinématographique française et européenne entre sa plateforme Disney+ et les organisations du cinéma français (BLIC, BLOC et ARP).
Dans les faits, l’accord permettra aux abonnés Disney+ de visionner ces films 9 mois après leur sortie en salles, contre 17 mois actuellement. Disney+ s’engage à investir 25% (contre 20% actuellement) de son chiffre d’affaires net annuel généré en France pour financer ces œuvres, et s’engage également en achat et en préachat, dans la création cinématographique, et au financement d’un minimum de 70 films sur la période du contrat.
Parallèlement, Disney+, à l’instar de Prime Video, Netflix et AppleTV+, s’est également accordée avec AnimFrance, le SATEV, le SEDPA, le SPI et l’USPA pour un premier accord dans le cadre des obligations d’investissement de la plateforme audiovisuelle issues du décret SMAD. Les instances représentatives ont fait part de leur choix de « soutenir la volonté du groupe Disney de faire évoluer sa plateforme vers un modèle qui fasse une plus large place au cinéma au sein d’une offre essentiellement audiovisuelle, avec la mise à disposition des longs métrages neuf mois après leurs sorties en salles », soulignent-elles dans un communiqué commun. « Au regard des critères de l’article 14 du décret SMAD fixant la répartition entre audiovisuel et cinéma, un partage à quasi-égalité de ce taux de 25% a été acté pendant la période de transition des trois années qui s’ouvre avec la conclusion d’un accord côté audiovisuel d’une part et côté cinéma d’autre part », précisent-ils encore. Néanmoins, à l’issue de ces trois années, et dans le cadre du renouvellement de ces accords, l’ARCOM « fournira aux parties les éléments nécessaires à la vérification de l’équilibre trouvé entre cinéma et audiovisuel. Ces taux pourront donc être modifiés au regard de la place effective du cinéma et de l’audiovisuel dans l’offre de la plateforme, la consommation des œuvres et le marketing telle qu’elle pourra être constatée », insistent-ils encore.
Concrètement, listent les signataires, Disney+ s’engage à : consacrer 100 % de son obligation d’investissement dans les œuvres audiovisuelles à des œuvres patrimoniales (fiction, animation, documentaires de création) à compter de 2025 ; maintenir son investissement à 85% dans des œuvres d’expression originale française ; porter son engagement dans la production indépendante à 70% de son investissement ; consacrer 17% de son obligation à la diversité des œuvres audiovisuelles, dont 5% pour le documentaire de création et 12% pour l’animation. Les parts EOF, indépendantes et inédites (75%) s’appliqueront chaque année sur les investissements de la plateforme dans les deux genres. Pour rappel, Disney avait rompu récemment son accord de diffusion avec Canal+, et lancé une campagne d'abonnement promotionnelle pour sa plateforme.
Pour Canal+, il y a « un sujet »... à 220 millions d'euros
Des accords qui interrogent d’ores et déjà le groupe Canal+. Celui-ci a en effet menacé ce même mercredi ses investissements annuels de 220 millions d'euros dans le cinéma. « Cette offre (de 220 millions d'euros annuels) n'est plus sur la table aujourd'hui. De mon point de vue, elle baissera nécessairement, la question c'est de combien », a déclaré le président du groupe Canal+, Maxime Saada, devant la Commission de la Culture du Sénat. Premier financeur du cinéma français, Canal+ dispose de la meilleure fenêtre de diffusion des films, soit six mois après leur sortie en salle, en vertu de la chronologie des médias. Selon M. Saada, la contrepartie proposée par la plateforme américaine se monte à « 115 millions d'euros » sur trois ans pour le financement du cinéma, soit « 38 par an en moyenne ». « C'est là où on a un petit sujet : si Disney est à 9 mois pour 35 millions d'euros, pour Canal+, il y a un sujet des 220 millions d'euros à 6 mois », a dit le dirigeant, en laissant planer la menace d'une baisse. Selon lui, le montant de 220 millions est « supérieur » aux obligations de financement de Canal+, qui se situent « autour de 100 » millions. Ces obligations, « calculées sur la totalité du chiffre d'affaires », pourraient encore diminuer, a-t-il prévenu.
« Si demain, Canal+ sépare le sport et le cinéma dans son modèle, l'obligation est divisée par deux, donc les 100 millions deviennent mécaniquement 50 », a-t-il mis en garde. « On me dit c'est une menace, tu ne le feras jamais, mais en fait on est à l'étude". Et de résumer: « La question pour les organisations du cinéma (...) c'est : Est-ce qu'elles préfèrent un modèle dans lequel Canal+ contribue largement », quitte à dépendre de lui, « ou est-ce qu'elles veulent se libérer de cette dépendance, mais prendre le risque de perdre 150 ou 200 millions d'investissements du groupe Canal ? ». Initialement, Canal+ était « prêt à signer » afin de reconduire pour cinq ans l'accord à 220 millions d'euros, mais « les organisations du cinéma » ne l'ont « pas souhaité, a affirmé M. Saada.