20 Minutes se réinvente
Frédéric Daruty, président de 20 Minutes France (co-détenu par les groupes SIPA Ouest-France et Rossel), a présenté mardi les contours de la nouvelle formule du journal gratuit, qui veut notamment s’appuyer sur des atouts révélés pendant les périodes de confinement : accélération sur le numérique et renforcement de la monétisation. Le média revendique avoir produit 230 contenus par jour en moyenne et augmenter son chiffre d’affaires sur ses formats vidéo à hauteur de +30%. En moyenne, 2,3 millions vidéos ont été vues et 675 764 exemplaires distribués chaque jour, selon les chiffres dévoilés mardi. L’occasion pour 20 Minutes de se repositionner, avec pour mots d’ordre l’accessibilité et la puissance. Frédéric Daruty souhaite promouvoir un « média d’information puissant, proche de ses lecteurs, qui veut rassembler et réunir le plus grand nombre ». Ce nouveau credo repose également sur le renforcement d’une information « inclusive, dans une société polarisée ». Le gratuit, qui veut jouer « l’apaisement », se refonde autour de trois axes : un nouveau positionnement éditorial, des développements numériques et un business model tourné davantage vers le digital — avec un objectif de 50% du chiffre d’affaires global issu du support numérique en 2022, à parité avec les revenus du journal papier (en 2019, le CA du numérique était de 37%).
« Un média d’inclusion et non d’opinion »
20 Minutes, qui a constaté un baisse de son chiffre d’affaires de 38% en 2020, souhaite « aller au devant des lecteurs », a expliqué Armelle Le Goff, directrice de la rédaction de 91 journalistes (dont un tiers en régions), en suivant trois mots d’ordre : réactivité, engagement et social. Le média va davantage s’engager, « sur les questions d’égalité femmes-hommes, les discriminations ou l’environnement, un axe au cœur des mobilisations de notre cœur de cible, les 18-30 ans ». Les sujets autour de l’environnement seront notamment couverts via des partenariats avec « des figures de ce mouvement ». Le journal veut également renforcer son lien avec les lecteurs, en les sollicitant ou en répondant à leurs interrogations. Dans cet objectif, « on conserve les commentaires sur le site », a notamment expliqué Armelle Le Goff, qui « fait le pari d’une information fabriquée avec ses lecteurs ». Le chemin de fer du journal a été « intégralement repensée », avec en fin de journal les « Dix News », ou le doublement de la page « Pause », qui comprendra un feuilleton suivant les aventures de jeunes trentenaires, en partenariat avec la startup Rocambole. Chaque parution, au nombre de trois par semaine, aura le droit à une thématique dédiée : Société & Conso (lundi) ; Planète (mercredi) ; Culture & Entertainment (vendredi).
Également au programme de la nouvelle formule, à paraître mercredi 9 juin : plus de visuels et d’infographies, une identité graphique repensée pour donner une « agitation à la maquette » ou encore des tests produits. « Nous sommes un média d’inclusion et non d’opinion », a indiqué Armelle Le Goff. Selon Frédéric Daruty, 800 000 exemplaires seront distribués par jour en 2021 (print + PDF), dans plus de 2 600 points de distribution, dont près de 700 en Île-de-France et 415 dans Paris intra-muros. Le journal, qui édite 11 éditions dans 12 villes en France, veut mettre en place de nouveaux réseaux, pour distribuer le journal dans des espaces de coworking par exemple, ou dans les « espaces de vie du matin » (commerces de proximité, cafés). Le président de 20 Minutes France veut également renforcer la présence du journal gratuit dans les écoles et universités. Du côté numérique, la rédaction déploie actuellement un nouveau back-office — « Storm » — « pour faire gagner du temps à la rédaction » en recentrant toutes les applications au même endroit. 20 Minutes a également mis en place une intelligence artificielle intégrée au CMS pour aider à la publication d’articles : recommandation de photos, de tags, de mots clés… « Le journaliste n’a plus qu’à valider », a expliqué Michael Fromentoux, directeur du développement numérique 20 Minutes France. Ce nouveau back-office, en déploiement progressif dans la rédaction du journal d’ici la fin de l’année, est également compatible mobile, et une intégration text-to-speech est encore en R&D.
Vers un « appel à la data »
Une refonte du site 20 Minutes est prévue pour l’année prochaine, dans l’objectif de le « moderniser », avec un travail sur la direction artistique pour identifier davantage les contenus 20 Minutes, « en un coup d’œil ». De nouveaux formats éditoriaux sont également à l’étude. « Avec 75% de trafic sur mobile, on se doit d’être fluide et efficace sur ce format », a ajouté Michael Fromentoux, qui souhaite également développer les stories sur le site. « L’axe de la proximité sera appuyé, avec plus de contenus locaux », a-t-il poursuivi, en indiquant que le contenu local était un bon « appel à la data », notamment pour se loguer. Du côté de la régie, l’accent sera mis sur les opérations spéciales. « On veut custumiser le contenu en fonction des intérêts des annonceurs », a déclaré Bruno Latapie, directeur exécutif de la monétisation de 20 Minutes, qui souhaite également accélérer sur la vidéo. « On travaille sur la qualité de nos annonceurs », a-t-il ajouté. Sur l’audio, 20 Minutes s’est lancé dans la co-création de podcasts avec des marques, à l’image du podcast « L’état des lieux » avec le réseau d'agences immobilières Laforêt. « Autre levier, l’automatisation des revenus, avec l’open auction, l’enrichissement de nos inventaires pour les rendre disponibles à tous », a conclut Bruno Latapie, citant notamment un partenariat avec Xandr — la régie annonce ne plus travailler avec la DMP de Weborama.
Pour ses annonceurs, 20 Minutes a aussi signé des « alliances stratégiques », avec Brut pour alimenter une verticale Planète ; avec Adot pour disposer de KPIs sur la performance ; ou avec son co-actionnaire Ouest-France, sur la monétisation des sites actu.fr et Ouest-France, « pour être plus puissant dans l’ère post third-party ». La data first-party sera mobilisée, « mais il n’y a pas de recette miracle » : personnalisation locale, dark mode, engagement. L’objectif : un inventaire logué, en cibler les lecteurs déjà « ultra-fidèles ». Frédéric Daruty a également mis à l’honneur la communauté #MoiJeune — 130 études réalisées avec 5000 membres d’un groupe Facebook, « une communauté très active ». La rédaction du journal prépare par ailleurs un dispositif autour de l’élection présidentielle pour les jeunes. Frédéric Daruty se fixe un cap : « retrouver en 2022 un niveau convenable de chiffre d’affaires ».