Réseaux sociaux et décideurs selon le Baromètre Social Selling
Myriam Nessali, directrice du Lab Innovation de La Poste Solutions Business, et Quentin Franque, directeur marketing de l'agence de marketing digital Intuiti, décryptent les résultats du nouveau baromètre Social Selling qui scrute les comportements d’achat des décideurs lorsqu’ils sont exposés aux contenus des réseaux sociaux. Force est de constater que si ceux-ci sont séduits, la marge de progression pour les marques reste encore importante pour se montrer totalement convaincantes. Interview.
Avec la 3ème édition du baromètre Social Selling réalisé par Intuiti pour La Poste Solution Business, vous étudiez la relation que peuvent avoir les décideurs aux contenus publiés sur les réseaux sociaux dans leur acte d’achat. Un sujet trop peu traité ? Pourquoi ?
Myriam Nessali : Le développement de l’usage commercial des réseaux sociaux en BtoB, rappelons-le, reste relativement récent. Il y a 4 ans de cela, l’objectif premier d’une visite sur linkedIN ou Viadeo était d’élargir son réseau et de mettre son CV en ligne dans le cadre d’un potentiel changement de job … Personne à l’époque n’y allait pour trouver un fournisseur ou lire des articles. Mais la donne a changé ces dernières années, on a pu mesurer que les objectifs de visites s’étaient largement diversifiés, on a vu l’apparition des forces de vente sur ces réseaux et la prise de conscience, par les marques, qu’elles avaient là un formidables terrain de jeu pour capter l’attention des décideurs à travers notamment des contenus ciblés. Il nous semblait intéressant de comprendre, aujourd’hui, l’influence que pouvait avoir ces nouvelles stratégies de contenus on line sur l’acte d’achat des décideurs BtoB.
Quentin Franque : C’est une très bonne question. A part dans certaines typologies d’entreprises (celles qui vendent en Saas ou les DNVB par exemple), la mesure de l’impact des contenus sur les ventes n’est pas réellement faite. Qu’ils soient publiés sur les réseaux sociaux ou ailleurs d’ailleurs. Les raisons sont diverses : des cycles de ventes long et donc sur lesquels on va surtout mesurer le dernier clic, des entreprises « sillotées » où les datas marketing et commerciales ne sont pas recoupées pour des raisons politiques, des agences ou des directions qui ont peur de découvrir impact trop faible et donc que leurs budgets soient coupés...
Quel sont les points clés que l’on peut extraire de cette étude ? Des résultats vous ont surpris ?
Quentin Franque : Justement que l’impact est certainement plus élevé qu’on ne le pense. Nous avons notamment découvert que 37,4% des décideurs BtoB ont déjà acheté un produit ou un service suite à la découverte d’un contenu sur les réseaux sociaux. Dans 2 cas sur 3, la personne n’était pas en contact avec l’entreprise avant de découvrir ce contenu.
Myriam Nessali : autre élément intéressant, la stagnation, depuis 3 ans, du niveau de satisfaction des décideurs BtoB quant à la qualité des contenus trouvés sur leur mur d’actualité. 40% seulement les apprécie. C’est dire la marge de progrès pour les marques ! Un constat qui peut s’expliquer par les changements que les entreprises de toutes tailles sont en train de vivre autour des métiers de la communication et du marketing. Ces fonctions en pleine transformation doivent passer de la vente push de produits et services pratiquées pendant des années à une démarche inbound avec des contenus intéressants leurs cibles, sur des sujets plus vastes. Une montée en compétence qui demande du temps.
Enfin, on remarque que 70% des décideurs considèrent que les échanges sur les réseaux sociaux sont « moins commerciaux » que sur d’autres canaux. C’est un atout indéniable, mais qu’il faut surveiller de près : cet indicateur baisse d’année en année, et a déjà perdu 8 point en 2 ans. Le jour où LinkedIN (qui est le réseau le plus largement utilisé, à 85%) devient une marketplace, il perdra largement de son intérêt. D’où l’importance, pour les entreprises, de bien accompagner leurs équipes sur la posture à tenir.
Finalement, quand 76% des décideurs sortent des réseaux sociaux pour rechercher des informations complémentaires dans leur parcours d’achat, peut-on se dire que les contenus des réseaux sociaux ce n’est pas trop leur « truc » et/ou qu’il y a méfiance envers eux ?
Quentin Franque : Non, il est plus probable que les décideurs donnent une utilité différente à chaque canal. Ils vont aller sur les réseaux sociaux pour l’inspiration, sur le site de la marque ou sur des comparateurs pour la réflexion, prendre contact avec d’autres pour de la confirmation…
Derrière votre question pointe un élément qui fait, selon nous, une immense différence : la cohérence du parcours global d’achat. Trop souvent, la stratégie de contenus est perçue dans sa globalité (mon persona doit voir tel contenu puis tel autre contenu et terminer par celui-là), mais sans prendre en compte ce qu’il y a autour de cette stratégie. Dans ce parcours, sur quels autres canaux ma cible va-t-elle se renseigner ? Quelle va être l’incidence de ces canaux ?
En travaillant ce parcours, en le cartographiant notamment, on arrive souvent à rediriger une partie de la stratégie de contenus et à identifier les canaux à optimiser en priorité, autour de cette stratégie.
Dans votre étude, les contenus des réseaux sociaux ne sont clairement pas la panacée dans l’acte d’achat. Quel est le parcours idéal, en fait ? Un véritable mix des supports ?
Myriam Nessali : Plus d’un tiers des décideurs achètent suite à la lecture d’un contenu trouvé sur les réseaux sociaux.... Personnellement, je trouve que ce score est très élevé !
Oui, le mix des supports est tout à fait fondamental, d’autant que l’on observe cette année une véritable fragmentation de l’usage des décideurs : il y a 2 ans, ils étaient consommateurs, très régulièrement d’articles et de livres blancs. La donne a changé : ils et elles sont aujourd’hui des consommateurs occasionnels… de tous types de supports. Vidéos, podcasts, livres blancs, articles…ils zappent de l’un à l’autre. Il est donc important d’essayer d’être présents sur ces différents supports pour parvenir à capter sa cible.
Quentin Franque : Tout en sachant que les entreprises ne peuvent pas tout faire, tout le temps. Elles sont toutes limitées dans leurs moyens financiers, stratégiques et humains. Donc il faut faire des choix. Et notre message est de dire que ces choix se font en travaillant le parcours global de la cible, une sorte de stratégie éditoriale augmentée.
Pour se procurer l'intégralité de l'étude, c'est ici.