Représentation des Femmes dans la pub : toujours pas au niveau
Dans sa dernière étude AdReaction, Kantar analyse le traitement des genres, son efficacité sur les campagnes et son impact sur les consommateurs et les marques. En bref : il y a encore du chemin à faire !
Près de 90% des spécialistes européens du marketing pensent qu'ils représentent les femmes de façon positive dans les publicités. A l'inverse, le public estime à 45% que les femmes ne sont toujours pas correctement représentées. Deux fois plus. Un décalage de perception très important entre marketeurs et consommateurs, que décrypte Kantar dans sa dernière étude AdReaction (1). "Un travail d'introspection est nécessaire de la part des professionnels ainsi que de leurs clients. L'incapacité à interagir de manière significative avec un public féminin réduit les possibilités de ventes des marques et limite leur valeur. Il est décevant de voir que les femmes sont généralement présentées comme moins puissantes, mais il est aussi encourageant que les publicités mettant en scène des femmes ayant plus d'autorité rencontrent plus de succès" explique Anne-Lise Toursel, directrice de l'expertise media & creative de Kantar Division Insights. Dommage quand on sait que les marques ont tout à y gagner (au sens premier du terme), puisque l'étude révèle que dépeindre et cibler correctement les femmes "impacterait positivement l'efficacité des campagnes publicitaires et pourrait représenter jusqu'à 9 milliards de dollars".
Pour continuer les chiffres présentés plus haut, 82% des publicités pour des produits d'hygiène et 78% des publicités pour de la nourriture sont représentés par des femmes. Les consommateurs ont donc du mal à se projeter dans les "représentations homme-femme telles que dépeintes dans les publicités d'aujourd'hui. Femmes et hommes sont en quête de représentations plus aspirationnelles et plus en phase avec les modes de vie d'aujourd'hui" note l'étude, "ce qu'ils ne retrouvent pas puisque, de leur point de vue, moins d'une publicité sur cinq met en scène une femme ou un homme à travers laquelle ou lequel ils aspirent à s'identifier".
Gentilles ?
Les publicités en France montrent plus de femmes "gentilles" (50% vs. 40% concernant des hommes) et seules 4% personnifient un personnage faisant autorité. Pourtant, les publicités incarnant des femmes avec un "rôle aspirationnel ou expert performent car elles sont perçues comme étant plus convaincantes et plus crédibles" (dans le Top30 de la base de données Kantar Millward Brown vs Top 50 quand ce sont des hommes). En France, quelque soit le thème, les publicités qui représentent uniquement des hommes sont plus nombreuses qu'ailleurs (37% vs. 25% au global), celles montrant uniquement des femmes moins nombreuses (31% de publicités vs. 34% au global), et seules 18% (vs. 27%) des publicités accordent part égale aux femmes et aux hommes. Une bonne publicité marche aussi bien auprès des hommes que des femmes. L'humour par exemple est un levier d'engagement prouvé en publicité. Lutter contre les stéréotypes de genre c'est ne pas hésiter à scénariser les femmes dans des situations humoristiques, aujourd'hui trop réservées aux hommes . Seules 22% des publicités représentant des femmes ont recours à l'humour contre 51% représentant des hommes par exemples. Or, en France 44% des femmes et 34% des hommes sont réceptifs à l'humour dans une publicité.
Ciblage et efficacité des médias
Selon l'étude BrandZ, la valeur moyenne des marques reposant sur un juste équilibre entre les genres est plus élevée (20,6 milliards de dollars contre 16,1 milliards pour les marques s'adressant au monde féminin et 11,5 milliards pour celles s'adressant au monde masculin). Or, seules 33% des marques parviennent à cet équilibre. "Les approches de ciblage simplistes de certaines marques ne parviennent pas à reconnaître que la prise de décision dépasse les distinctions de genre dans la plupart des catégories" précise encore l'étude. En France, les femmes sont tout autant décisionnaires que les hommes pour les achats avec une proportion plus élevée que la moyenne de femmes décisionnaires dans l'achat de voiture (75% vs 56% au global ) et d'hommes dans l'achat des courses alimentaires (88% vs 68% au global) par exemple. Côté format, les publicités en ligne ne parviennent pas au résultat escompté pour les femmes. En 2018, elles ont généré 28% d'impact en moins sur la marque que pour les hommes et moins de femmes jugent les publicités en ligne pertinentes de manière fiable. En France, comme au global, les femmes préfèrent plus largement que les hommes les vidéos en ligne plus courtes et détestent les formats de publicité qu'elles ne peuvent pas passer (53%), créant chez elles un sentiment d'impuissance. Au-delà de la publicité payante, l'activité des points de vente et le bouche à oreille ont souvent plus d'impact sur les femmes. "Le chemin à parcourir n'est pas simple. Les marques doivent avancer avec précaution et être conscientes de la façon dont elles sont perçues. Certaines marques plus progressistes ont plus de latitude pour remettre en cause les stéréotypes de genre, et elles doivent aussi tenir compte des comportements socio-culturels locaux » conclut Anne-Lise Toursel.
(1) Méthodologie : AdReaction s’appuie sur l'analyse de 30 000 tests publicitaires dans la base de données publicitaire mondiale “2018 Link™”, les réponses de 450 spécialistes mondiaux du marketing, les comportements publicitaires de près de 40 000 consommateurs dans le monde ainsi que l'analyse du capital de marque de plus de 9 000 marques mondiales.