Les meilleures choses
Cela fait longtemps que je vous écris, six ans d’après la base d’articles de CB News, et je ne suis pas sûr de vous avoir déjà dit que mon premier travail de journaliste était de faire une revue de presse. C’est un boulot sympathique et intéressant qui consiste à synthétiser les infos parues dans la presse pour des gens qui n’ont pas le temps de tout lire. Je devrais d’ailleurs mettre cette phrase au passé car à l’évidence une intelligence artificielle doit facilement accomplir ce genre de tâche de nos jours. Quoi qu’il en soit, c’est en lisant les articles de mes confrères que j’ai appris mon métier. Un peu comme une AI, mais beaucoup plus laborieusement. J’ai aussi découvert le plaisir de dénicher des infos qui avaient pu échapper à la majorité des lecteurs, soit parce qu’elles étaient cachées dans un flot de brèves, soit parce qu’elles n’étaient parues que dans des publications confidentielles. J’ai eu une sorte de réminiscence cet hiver en tombant sur l’annonce de l’abdication de la reine Margarethe II du Danemark. L’info était pourtant sur le site d’un quotidien du soir bien connu, mais il est vrai qu’elle a été publiée le 31 décembre vers 20 heures et qu’elle n’était pas de première importance. Or donc, à l’âge vénérable de 83 ans, Daisy - c’est ainsi qu’elle était surnommée, ne me demandez pas pourquoi — qui est sur le trône depuis 1972, a décidé que ça suffisait comme ça. Elle passe la main à son fils, le prince héritier Frederik. Et là vous vous dites que c’est la raison pour laquelle cette nouvelle pas vraiment fondamentale m’a accroché l’œil. C’est vrai, mais ce n’est pas la seule raison. En ces temps de renouvellement de gouvernement, c’est également le moment pour moi de prendre du recul. Je n’abdique ni ne démissionne, je me retire. Comme dirait Daisy (je suis le seul à ne pas comprendre le rapport avec Margarethe ?), « il est temps de transférer les responsabilités à la génération suivante ». En ce qui me concerne, il n’y a plus beaucoup de responsabilités si ce n’est celle de vous écrire tous les dimanches. Car vous l’avez compris – je sais votre vivacité d’esprit - vous lisez là mon dernier édito du week-end pour CB News. Le jour précis où le prince Frédérik (je peux l’appeler Fredo ?) succédera à sa mère. Mais je vous garantis que c’est une pure coïncidence.
En cette occasion exceptionnelle, je me permets un deuxième paragraphe pour vous dire à quel point j’ai eu du plaisir pendant ces années à entretenir cette correspondance. Plaisir apparemment partagé étant donné le nombre d’encouragement que j’ai reçu. Tiens, il y a encore quelques semaines, alors que je me trouvais dans une soirée très mondaine, une femme est venue me voir pour me dire qu’elle appréciait grandement ces éditos. Je dois dire que j’ai été particulièrement touché et pas seulement parce que je ne connaissais pas grand monde dans l’assistance de ce cocktail. J’y ai toujours mis beaucoup de cœur et d’engagement, même dans la légèreté, et ces compliments sont ma récompense. On m’a parfois demandé comment et quand ces articles étaient écrits. Le vendredi matin, la plupart du temps, très vite pour le premier jet. Et jusqu’à la nuit du samedi au dimanche pour l’affinage. Pour celui que vous avez sous les yeux, le processus a été un peu plus long. Mais comme toutes les semaines (ouvrables) depuis 2017, cet exercice ne m’a jamais pesé, au contraire. Cependant les meilleures choses ayant une fin (je rappelle à l’intention des pessimistes que les pires aussi), je vous laisse vos dimanches libres de mes élucubrations. Et faute d’avoir trouvé une chute à la hauteur de cette dernière occasion, je vous adresse mes meilleurs vœux et vous souhaite une très bonne année. Sans originalité mais avec beaucoup de sincérité.