La Chine en plein tour de vis contre la tech
La Chine envisage d'interdire aux entreprises détenant trop de données sensibles de se coter aux Etats-Unis, sur fond de tensions sino-américaines et de reprise en main du secteur du numérique, affirme vendredi le Wall Street Journal. Le pays a longtemps encouragé l'expansion internationale de ses entreprises publiques et privées et nombre d'entre elles lèvent des fonds sur les places boursières américaines pour se développer. Mais dans un contexte de rivalité croissante avec Washington, Pékin redoute que des données cruciales accumulées par ses géants du numérique ne fuient à l’étranger. Selon le Wall Street Journal, les régulateurs chinois ont récemment indiqué à certaines firmes que celles détenant une grande quantité de données sensibles ne pourront plus lever de fonds aux Etats-Unis.
Le quotidien des affaires ne précise pas ses sources. Et la date d’entrée en vigueur potentielle d'une telle mesure n'est pas connue. Par ailleurs, les entreprises qui souhaiteront lever des fonds aux Etats-Unis devront recevoir au préalable le feu vert des autorités chinoises, affirme le Wall Street Journal. Pékin se montre ces derniers mois particulièrement intransigeant envers les géants du numérique, vis-à-vis de pratiques jusque-là largement répandues, notamment en matière de données personnelles. Les autorités s'en sont ainsi prises en juillet à l'une des pépites chinoises du numérique, le champion du VTC Didi, après une entrée en Bourse aux Etats-Unis qui lui a permis de lever 3,7 milliards d’euros. Le « Uber chinois » est depuis visé par une enquête en lien avec sa collecte des données personnelles.
Et sur ordre des autorités, l'application ne peut désormais plus être téléchargée en Chine, une mesure toutefois sans conséquence pour les utilisateurs de Didi l'ayant déjà installée sur leur téléphone. Les entreprises liées à l'internet sont particulièrement dynamiques en Chine où une législation jusque-là relativement laxiste sur les données, et l'absence de concurrents étrangers, ont permis à des géants locaux d’émerger. Pékin cherche cependant ces derniers mois à davantage réglementer ce secteur en pleine expansion. La semaine dernière, la Chine a adopté une grande loi pour empêcher les collectes abusives de données personnelles en ligne par les géants du numérique. Et le pays a rendu public vendredi un projet de réglementation visant à encadrer plus strictement le recours aux algorithmes. Très utilisés par les mastodontes du secteur pour assurer leur succès, ces outils sont au coeur de l'économie numérique et servent de cerveau à bon nombre d'applications et services sur internet.
Les algorithmes dans le viseur
Par ailleurs la Chine a rendu public vendredi un projet de réglementation visant à encadrer plus strictement le recours aux algorithmes par les géants du numérique, dans un contexte de reprise en main du secteur par Pékin. Outils très utilisés par les mastodontes du secteur pour assurer leur succès, les algorithmes sont au coeur de l'économie numérique et servent de cerveau à bon nombre d'applications et services sur internet. Ils permettent notamment d'analyser les quantités d'informations récoltées sur un utilisateur et de lui faire des recommandations automatiques en fonction de ses habitudes ou préférences. Pékin s'inquiète du manque de transparence des géants de la tech vis-à-vis de cette pratique. Les autorités cherchent ainsi ces dernières semaines à davantage encadrer les algorithmes. En vertu d'une nouvelle réglementation, les entreprises du numérique devront permettre à leurs utilisateurs de « désactiver » les algorithmes de recommandation.
Ces derniers ne pourront « pas être utilisés » pour « déterminer des prix basés sur des préférences et des habitudes », précise le texte publié vendredi par l'Administration chinoise du cyberespace (CAC). Cette pratique « déraisonnable » est courante notamment dans le tourisme, où des applications de réservation de billets proposent des tarifs différents pour un même produit ou service en fonction du degré de fidélité d’un utilisateur. La réglementation interdit par ailleurs le recours aux recommandations d'algorithmes pour les mineurs, afin de prévenir toute « addiction à internet ». Les algorithmes sont abondamment utilisés par les plateformes vidéo de divertissement, comme Douyin (version chinoise de TikTok), une application très consultée par les jeunes Chinois. Ces nouvelles directives sont soumises à commentaires pendant un mois. L'entrée en vigueur potentielle de la réglementation n'est pas précisée.
Les autorités chinoises se montrent ces derniers mois particulièrement intransigeantes contre les géants du numérique, pour des pratiques jusque-là tolérées et largement répandues. Plusieurs mastodontes du secteur ont ainsi été épinglés en matière notamment de données personnelles, de concurrence et de droits des utilisateurs. Pékin a depuis étendu sa campagne de « rectification » à d'autres secteurs dont les très lucratifs cours de soutien privés ou la livraison de repas. La Chine a adopté la semaine dernière une grande loi pour empêcher les collectes abusives de données personnelles en ligne par les géants du numérique.