Benjamin Dessagne et Stéphane Santana (CLM BBDO) "on se rend maintenant compte à quel point notre secteur est fragile"
Voilà nous y sommes...Dans la quatrième semaine de confinement. C'est difficile. CB News a une chance. Celle de continuer d'informer. Nous poursuivons notre série d'interviews, débutée le 17 mars, avec aujourd'hui le témoignage d'un duo : Benjamin Dessagne et Stéphane Santana, directeur de la création chez CLM BBDO.
1) Comment y arrivez-vous ? ou pas ? A travailler, à inspirer, à créer ?
Benjamin Dessagne et Stéphane Santana : on y arrive. Par intermittence. C’est bénéfique d’être occupé dans des journées trop longues, comme il est nécessaire de profiter de certains moments dans la journée où l’on peut souffler. C’est tellement rare lors d’une journée type d’agence. Mais lorsque se chevauchent les devoirs, les calls, et les repas à préparer, il y a des journées assez "techniques à gérer". Pour peu qu’il y ait un apéro sur HouseParty, tu finis totalement rincé. Mais pas que. Ce qui est sûr, c’est qu'on passe moins de temps dans des réunions sans fin. On va plus à l’essentiel. Moins de bullshit, plus d’efficacité. Car on ne va pas se mentir, c’est pas un super plaisir ces meetings à plusieurs. Il y a encore des progrès à faire de ce côté-là. J’espère qu’on saura prêts pour la prochaine pandémie. Maintenant, comme tout le monde, nos productions sont décalées. Sur Ubisoft notamment. Ça nous permet de prendre le temps de bichonner les scripts, réorienter les notes d’intentions des réalisateurs, se prendre la tête sur des scènes, trouver LE parfait prestataire sur les activations. Là-dessus, on peut, et on se doit d’être exigeant, avec tout le monde, nous inclus. De manière générale, on garde une exigence sur tous les briefs. Car la meilleure façon de ressortir de tout ça, c’est d’avoir de belles productions dans les tuyaux. C’est bien beau les discours d’intention, mais ce qui compte, c’est ce que nous sortirons une fois de retour.
2) Avez-vous "trouvé" de nouvelles sources d'inspiration ?
Benjamin Dessagne : culinairement oui. Je suis épaté par les talents de cuisinier de certains de mes amis. Moi qui pensais savoir un peu cuisiner, je vais retourner faire des boulettes goût carton. Après, occuper les enfants te force à trouver un peu d’inspiration, c’est certain. Dans la cour de mon immeuble, je me suis vu inventer un parcours de trottinette avec une vieille bassine, un meuble qui traînait, un balai et des branches… Voilà. Trente minutes de passées.
Stéphane Santana : ça va paraître cliché, mais je suis épaté par les caissières, les livreurs, les routiers, tous ceux qui font encore tourner la boutique France et qui font qu’on ne mange pas encore des cailloux. Et bien sûr comme tout le monde, par le corps médical. S’il s’agit de trouver de nouvelles sources d’inspiration, c’est de ce côté qu’il faut chercher. Ça met encore une fois beaucoup de choses en perspectives. Notre métier n’est pas indispensable et on se rend maintenant compte en ce moment à quel point notre secteur est fragile. Si la publicité venait à disparaître, pas sûr que ça manquerait vraiment à qui que ce soit. Il suffit de regarder les commentaires fait par des gens sous un post de BFM annonçant le séisme qui touche notre milieu. En gros, ils n’étaient pas tellement dans la compassion. Ce ne serait pas bête de se demander pourquoi tant de haine ?
3) Qu'est-ce qui vous manque le plus dans la pratique de votre métier ?
Benjamin Dessagne et Stéphane Santana : les tournages. "Fratelli Pastore", l’italien à côté de l’agence. Boulogne-Billancourt…Pas trop.
4) L'imaginaire est libre lui : où irait le vôtre si vous deviez créer une campagne pour une marque imaginaire ?
Benjamin Dessagne et Stéphane Santana : déjà, on demanderait à notre imaginaire s’il a bien signé son attestation de déplacement dérogatoire, et ensuite, on lui permettrait d’aller où il veut. Tant qu’on n’y trouve pas de pangolin.