Alexandre Drouillard (ici Barbès) "On se voit, certes, mais on ne se ressent pas"
Voilà nous y sommes...Dans la quatrième semaine de confinement. C'est difficile. CB News a une chance. Celle de continuer d'informer. Nous poursuivons notre série d'interviews, débutée le 17 mars, avec aujourd'hui le témoignage d'Alexandre Drouillard, directeur de la création de l'agence ici Barbès.
1) Comment y arrivez-vous ? ou pas ? A travailler, à inspirer, à créer ?
Je m’aperçois que mon travail consiste essentiellement à parler et échanger des idées, le plus souvent dans un cadre non défini. J’ai beaucoup de mal avec les visio-conférences qui doivent être prévues, planifiées. On se voit, certes, mais on ne se « ressent » pas. Ce feeling et cet aspect humain me manquent. Le travail à distance sur une longue durée change ce rapport spontané et pétillant de notre métier. Le rapport social que j'ai avec mon équipe de créatifs d'habitude est essentiel. Ça crève les yeux aujourd'hui. En revanche, le confinement permet de se recentrer sur soi-même. On s’occupe de soi, de ses proches. On mange bien. On prend le temps de faire les choses. On dort un peu plus. C’est très bon pour l’inspiration je trouve. Cela a réduit la vitesse incontrôlable de la vie, laissant plus de temps pour réfléchir, fouiller, reprendre des projets personnels qu’on avait laissé de côté, trier nos milliers de photos, regarder en profondeur le compte Instagram d’un graphiste qu’on vient de découvrir…Et puis, la création publicitaire, c’est une création sous contrainte. C’est d’ailleurs ce qui fait l’intérêt de ce métier. Le confinement est une contrainte supplémentaire. Dans un sens, c’est excitant. Par exemple, en ce moment, nous travaillons sur un film avec la contrainte de ne pas pouvoir tourner et je crois que nous allons y arriver.
2) Avez-vous "trouvé" de nouvelles sources d'inspirations ?
J’ai ressorti mon appareil photo. Je documente la vie quotidienne à la maison. J’ai l’impression de faire un reportage sur une famille dans le cockpit d’un bateau pendant une traversée. Il y a des images intéressantes qui ressortent. On pose le regard sur des choses qu’on ne voyait même plus. J’ai aussi téléchargé une carte du ciel sur mon smartphone. Mon inspiration du moment, ce sont les étoiles, les constellations. Quand je réussis à trouver Castor et Pollux dans le ciel, je ne sais pas pourquoi mais ça me fait un truc.
3) Qu'est-ce qui vous manque le plus dans la pratique de votre métier ?
L’improvisation. Avoir des idées fulgurantes. C’est ce qui m’excite la plupart du temps. Quand on est ensemble, on peut faire ça. A distance c’est difficile. Tout est beaucoup plus planifié, normé, optimisé.
4) L'imaginaire est libre lui : où va le vôtre si vous deviez créer une campagne pour une marque imaginaire ?
Je ferais une campagne pour Castor et Pollux. Pour faire en sorte que ceux qui, comme moi, ont oublié les choses simples se remettent à lever les yeux. Après, il y a aussi le pangolin qui va avoir besoin d’une sacrée bonne agence…