Vincent Lamkin (Comfluence) : « il y a un enjeu majeur à engager des actions fortes »
Deuxième semaine de confinement… CB News poursuit sa série d'interviews de professionnels de la filière communication, initiée mardi 17 mars dernier. Vincent Lamkin, cofondateur et directeur associé de l'agence Comfluence, s'est prêté à l'exercice. Voici ses réponses.
1) Le confinement s'est généralisé. Comment faîtes-vous face à l'agence ?
Nous avons, comme beaucoup sans doute, anticipé les mesures de confinement et le basculement en télétravail. Nous nous sommes assurés de disposer des meilleures technologies de connexion avec nos clients et l’ensemble de nos interlocuteurs, mais aussi d’un accès optimal aux logiciels métiers nécessaires à la conduite de nos missions. Nos serveurs sont très fiables et c’est un atout précieux.
Par ailleurs, pour compenser la perte en relations quotidiennes au sein des bureaux, nous avons renforcé les dispositifs dématérialisés de réunions internes. Chaque directeur de pôle organise un meeting journalier avec ses équipes, là où cela se fait habituellement une fois par semaine. De même, pour les équipes qui fonctionnent en mode projet sur de gros dossiers. Le Comex a été lui aussi dématérialisé, et nous avons renforcé son ordre du jour, en abordant plus en profondeur les dossiers de nos clients du fait des impacts de la crise.
Très concrètement, le point le plus difficile à gérer c’est, pour les collaborateurs parents, la garde des enfants à la maison. Nous veillons à être attentifs à ce point et à accompagner au mieux l’équilibre vie privée, vie professionnelle qui prend une nouvelle dimension dans ce contexte difficile.
2) Comment réagissent vos clients ? Quels sont vos principales préconisations pour les campagnes en cours ?
Nos clients sont inégalement impactés par la crise mais tous ont clairement un grand sens de leurs responsabilités vis-à-vis de leurs mandants, de leurs équipes, de leurs clients, de leurs missions. Le quotidien se fait souvent mobilisation générale pour tenir le cap, en dépit des conditions de travail. On est dans de l’exceptionnel tout en sachant qu’il va falloir tenir sur la durée.
Pour tous ceux que nous accompagnons, chaque cas est différent. Nous avons conseillé, par exemple, de maintenir la Journée française de l’allergie car l’événement a du sens dans la période. Et les retours nous prouvent que nous avons eu raison. Pour un ensemble d’activations RP et influence, nous nous adaptons en capitalisant sur des formats alternatifs. Plusieurs clients sont aujourd’hui dans une posture de combat pour animer leurs activités, nous les aidons à bien se positionner dans le cadre de ces nouveaux dispositifs qui sont en train de se mettre en place. A l’inverse, pour certains clients, comme le Conseil National des Barreaux, nous avons été conduits à reporter des campagnes programmées afin de donner la priorité à d’autres opérations, qui tiennent compte des événements.
3) Concernant l'impact financier de cette crise inédite, en mesurez-vous les conséquences ?
A l’échelle de la société, il est évident que le coût social et économique de cette crise sera abyssal, et il est difficile d’en mesurer les conséquences tant beaucoup d’inconnues demeurent, y compris sur sa durée qui constitue un paramètre clé.
A l’échelle de l’agence, nous avons la chance que la nature de nos missions et de nos clients nous préserve de fortes secousses sur l’activité. En revanche, le développement, qui était très dynamique avant la crise, risque de connaître un ralentissement certain. L’inconnue principale, pour nous, est à ce niveau-là. En même temps, il y a un enjeu majeur pour tous les acteurs à préparer l’après, à l’anticiper, à engager des actions fortes ; nous travaillons déjà en ce sens.
4) Comment pouvez-vous être utile à la société en ce moment ?
On reprend conscience que la société c’est aussi une addition d’individus qui peuvent avoir isolément des impacts positifs ou négatifs sur leur environnement humain et naturel immédiat. Donc, nous sommes pragmatiques et humbles, et nous commençons par être utiles en étant responsables vis-à-vis de ceux que nous impactons directement : nos collaborateurs, en étant bienveillant avec eux, en respectant leurs contraintes personnelles pour leur permettre de gérer au mieux la période ; nos clients, en nous faisant un devoir d’honorer nos engagements et de leur assurer une continuité de service. Beaucoup assurant des missions d’intérêt général, c’est un honneur de le faire.
Mais nous avons décidé de nous engager nous aussi plus largement. Nous avons commencé la semaine dernière avec un dispositif #ComfluencePartage, qui permet via les réseaux sociaux de mettre à disposition de tous de l’information utile, qui impacte l’appréhension de l’actualité. Nous allons aussi commencer cette semaine à offrir aux dirigeants d’ETI un « speed coaching » afin de les accompagner dans cette phase délicate, pour les aider en termes de communication et d’influence à gérer la crise, à se positionner, à préparer les plans de relance.
5) Après la crise, allez-vous modifier certaines de vos approches ?
Il est prématuré pour moi de répondre pleinement à cette question. On connait la rengaine : plus rien ne sera comme avant. Et on ne souhaite finalement qu’une chose en ce moment : que tout redevienne, plus ou moins, comme avant dans notre quotidien !
Cette crise, dont on ne sait pas encore l’étendue des dégâts mais dont on perçoit déjà bien la déflagration symbolique, impactera aussi notre vision, comme conseil, quant à l’avenir de la société et de ses corps constitués. Pour l’heure, elle tend à valider la valeur et le sens de certaines de nos approches : sur les enjeux de l’ancrage, de la proximité et du local ; sur l’évolution de la place de l’entreprise et ses responsabilités nouvelles, y compris en regard d’un État qui se veut fort mais qui se révèle de plus en plus fragile sur le régalien.