Influenceur : le ministère de l’Économie a réuni les parties prenantes
Désireux de mieux encadrer les pratiques des influenceurs et leurs relations avec les marques, au coeur de nombreuses polémiques, le gouvernement a annoncé vendredi le lancement d'une consultation publique, tandis que ce secteur en plein boom plaide pour l'autorégulation.
Pour la première fois, une réunion était convoquée à ce sujet vendredi à Bercy, avec une cinquantaine d'acteurs. Pas de big-bang législatif en vue cependant : après les échanges, le gouvernement a indiqué vouloir "prendre le temps" d'analyser un "secteur morcelé avec une chaîne de valeur complexe". Les participants ont donc quelques jours pour envoyer leurs propositions écrites, puis une consultation publique sera ouverte sur internet, en parallèle de quatre "groupes de travail thématiques". Le ministre de l'Économie Bruno Le Maire rendra compte de ces contributions et d'éventuelles décisions d'ici mars 2023. Le conflit ces derniers mois entre Magali Berdah, patronne de la puissante agence d'influenceurs Shauna Events, et le rappeur Booba a mis en lumière certaines dérives de la promotion de produits sur les réseaux sociaux et les risques, notamment pour les plus jeunes. Magali Berdah a été accusée par Booba de recourir à des pratiques commerciales trompeuses. Elle dénonce de son côté un cyber-harcèlement qui doit déboucher sur un procès. Les deux intéressés n'étaient pas invités à la table-ronde, qui a réuni des influenceurs (comme le vidéaste HugoDécrypte), des agences, les principaux réseaux sociaux (Facebook, YouTube, TikTok et Snapchat) et des organisations représentatives du monde de la communication, dont l’ARPP.
Vers la création d’une fédération professionnelle
La Direction générale des entreprises, la Répression des fraudes (DGCCRF) et la Direction générale des finances publiques étaient également présentes, aux côtés de l'Autorité des marchés financiers et de l'Autorité nationale des jeux, afin d'entendre les propositions du secteur pour mettre fin aux pratiques illicites. "C'était plutôt constructif", a déclaré auprès de l'AFP la présidente du Syndicat du conseil en relations publiques Sandrine Cormary. Selon elle, le gouvernement a entendu la proposition de rendre "plus transparent" le modèle économique des agences qui se rémunèrent à la fois auprès des marques et des influenceurs. Sept agences ont annoncé à cette occasion une future "fédération professionnelle", qui aura pour vocation d'établir "une charte de valeurs", "un guide des bonnes pratiques" et un "comité d'éthique". "Tous les gens autour de la table veulent que l'influence conserve une bonne image. (...) Au bout d'un moment, la bonne volonté globale devra s'appliquer à tout le monde", a indiqué Bercy.
Une proposition de loi déposée
Le marché du marketing d'influence représentait en 2020 un marché mondial estimé à 9,7 milliards de dollars, selon des chiffres cités par l'Autorité de régulation professionnelle de la publicité, et à plus de 13 milliards l'an dernier. La France compte environ 150.000 créateurs de contenus. Parmi eux, l'ARPP en a formé 280 aux règles applicables en matière de communication commerciale via le "certificat de l'influence responsable", qui commence à être exigé par certaines marques. "On sent un encouragement à ce que cette action de pédagogie soit étendue. Il y a une demande à ce que de gros acteurs fassent des campagnes de sensibilisation, d'éducation, sur le cadre légal et la déontologie. Ce pourrait être le rôle des plateformes par exemple", a avancé à l'AFP le directeur délégué de l'ARPP Mohamed Mansouri. Le député EELV Aurélien Taché a de son côté déposé fin novembre une proposition de loi visant à "encadrer les pratiques commerciales et publicitaires liées au marché de l'influence sur internet". Mais, selon Manuel Diaz, qui dirige Influx, une agence représentant les influenceurs auprès des marques, "il y a déjà des lois qui permettent à l'État d'agir" contre les mauvaises pratiques et de nouvelles mesures ne sont pas nécessaires.