Commission européenne : Stéphane Séjourné proposé à la succession de Thierry Breton

Stéphane Séjourné

Le ministère des Affaires étrangères Stéphane Séjourné

(© CC)

Emmanuel Macron propose le ministre démissionnaire des Affaires étrangères Stéphane Séjourné pour succéder au commissaire européen Thierry Breton. Ce dernier a annoncé sa démission sur X, dans la matinée.

Le président Emmanuel Macron propose lundi son ministre démissionnaire des Affaires étrangères Stéphane Séjourné comme commissaire européen "centré sur les enjeux de souveraineté industrielle, technologique et de compétitivité européenne", après la démission fracassante de Thierry Breton, a annoncé l'Elysée. Stéphane Séjourné a été "président du groupe Renew (centristes et libéraux, NDLR) au Parlement européen au cours de la précédente législature", défend la présidence.

Commissaire au Marché intérieur, Thierry Breton a annoncé lundi sur le réseau social X  (ex-Twitter) démissionner avec effet immédiat, affirmant que la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, avec qui il était en froid, avait réclamé son retrait au président français. Selon lui, Mme von der Leyen a proposé en contrepartie à la France dans "la toute dernière ligne droite" de la formation de son futur collège, en "guise de compromis politique", "un portefeuille prétendument plus influent pour la France". Emmanuel Macron remercie Thierry Breton, "un remarquable Commissaire européen" qui a "fortement contribué à faire avancer une politique de souveraineté européenne dans les domaines du numérique (DSA/DMA), du soutien à la base industrielle et technologique de défense européenne ainsi qu'en faveur de la résilience du marché unique de l'Union européenne pendant la crise du Covid".

Le shérif du web 

Chargé du numérique, Thierry Breton est à la manœuvre dans les enquêtes visant X (ex-Twitter), Meta (Facebook, Instagram) et TikTok, pour la diffusion présumée de "fausses informations" et de "discours de haine". Sur les réseaux sociaux, il interpelle directement Elon Musk qui lui répond du tac au tac. Les deux hommes, qui se sont rencontrés à plusieurs reprises, semblent d'abord s'apprécier, mais la multiplication des mises en cause de X en Europe les conduit à des échanges publics de plus en plus hostiles. Les législations (DSA et DMA) pour mettre au pas les géants du numérique Amazon, Apple, Google ou Meta sont l'un des principaux faits d'armes de Thierry Breton. Il est l'artisan de ces deux textes qui imposent de nouvelles obligations et interdictions pour en finir avec les abus de position dominante et le laisser-faire dans la diffusion de contenus illégaux. "L'internet ne peut rester un Far West", explique le nouveau shérif du web. Avocat d'une Europe souveraine, il incarne l'ambition du Vieux continent de mieux défendre ses intérêts face à la Chine et aux Etats-Unis.

L'ingénieur de 69 ans n'est pas le meilleur des orateurs. Le commissaire à la chevelure frissonnante est parfois raillé pour la longueur de ses prises de parole durant lesquelles des idées nombreuses peuvent se bousculer de façon désordonnée. Mais l'ancien patron de grands groupes français de la "tech" (Bull, Thomson Multimédia, France Telecom, Atos) est dans son élément quand il parle de numérique et d'industrie. Une galette de matériau semi-conducteurs à la main, il peut se lancer dans de longues explications techniques sur les puces électroniques. L'ancien professeur de gouvernance des entreprises à Harvard, auteur de plusieurs romans d'anticipation et essais de science-fiction, enchaîne les plateaux télé. Et sait se rendre indispensable.

Un architecte européen

À Bruxelles, le commissaire au Marché intérieur était sur tous les fronts. Architecte de la relance de l'industrie européenne, Thierry Breton s'est surtout fait connaître du grand public pour sa lutte contre les abus de pouvoir des géants du numérique, avec son style de patron à la fois atypique et très politique. A sa nomination en 2019, il quitte la tête du groupe français de technologies Atos et devient le premier grand chef d'entreprise à débarquer dans l'univers policé de la Commission européenne. Il aime faire de la politique et sortir les gants de boxe, y compris parfois contre certains collègues. Il aura sans doute engagé le combat de trop au printemps en s'en prenant publiquement à la présidente Ursula von der Leyen qui aurait, selon lui, demandé sa tête à Emmanuel Macron.

Le commissaire français avait publiquement mis en cause l'éthique de Mme von der Leyen après la nomination fin janvier d'un émissaire chargé des petites et moyennes entreprises, un poste hautement rémunéré au sein de la Commission. Le poste avait été attribué à l'eurodéputé allemand du Parti populaire européen (droite) Markus Pieper, quelques semaines avant un congrès à Bucarest début mars au cours duquel le PPE avait apporté son soutien à un second mandat de Mme von der Leyen. La polémique, en pleine campagne pour les élections européennes de juin, aboutit finalement au retrait de M. Pieper, mais sans plomber la dirigeante allemande, réélue en juillet à la tête de la Commission. En juillet 2023, Thierry Breton avait déjà bataillé contre la commissaire à la Concurrence, Margrethe Vestager. Après une vive polémique, il pousse la Danoise à renoncer au recrutement d'une Américaine à un poste clé pour la régulation du numérique en Europe. Mais il égratigne aussi au passage Mme von der Leyen qui avait approuvé ce choix.

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