Pourquoi la voix est-elle le futur de la communication des marques?
Les marques feraient bien de se mettre à parler pour toucher les générations futures. Par Virginie Puchaux, directrice de Hotwire France.
Les générations actuelles et futures de consommateurs sont des générations sur-connectées, et par conséquent sur-renseignées. Le moteur de recherche Google est intégré à notre quotidien, le monde est accessible à portée de clics via nos smartphones. L’intelligence collective est dans nos poches et Internet fait de nous des personnes plus renseignées, même si plus dépendantes.
Mais comment faisaient-ils avant pour « savoir » ? L’ignorance n’a plus d’excuses aujourd’hui, le savoir est à notre disposition, délocalisé sur le Cloud. Il semble fort improbable de voir une inversion de ce phénomène, en effet à part quelques irréductibles, je doute que nous n’opérions un retour vers les encyclopédies imprimées. Parce que notre monde est plein de contradiction, un débat contestataire se développe autour de la dépendance à nos écrans. Nous sommes aussi en quête de davantage de fluidité, d’intuitivité. C’est là que le potentiel de la voix intervient.
Et si toutes les réponses, étaient à portée de voix ? Et si demain, il suffisait de demander un nouveau pack d’eau pétillante, à voix haute, pour être livré 2 heures plus tard sur le pas de la porte ? Ces questions sont en fait loin d’être futuristes. De plus en plus d’entreprises et de laboratoires de recherches développent des technologies vocales qui ont pour objectif de révolutionner les interactions entre les hommes et les machines et d’en faciliter leur quotidien. Et comme toute révolution, les marques ont tout intérêt à saisir le train en marche pour continuer à adresser leur audience. Plus sensible que tout autre, la génération alpha : encore jeune mais pourtant déjà clé dans le parcours de consommation.
Alors comment la voix et les technologies associées à la voix peuvent révolutionner la manière dont les entreprises s’adressent à leur public ? La voix serait-elle facteur d’engagement ?
Les technologies, au cœur de la communication auprès de la génération Alpha
Selon la dernière étude d’Ofcom sur les enfants et leur usage des médias, basée sur une enquête datée de 2016, il apparaît que les 5-15 ans sont de plus en plus nombreux à posséder un smartphone (41%) ou une tablette (44%).
Si ces appareils tiennent le haut du podium, de nouvelles technologies apparaissent, basées sur des formes d’interaction différentes. Des appareils toujours plus intelligents vont devenir la norme pour la génération qui grandit avec eux : l’intelligence artificielle va élargir notre vision des possibilités offertes par la technologie. Des algorithmes vont offrir des expériences davantage personnalisées et de nouvelles interfaces donneront accès à de nouveaux modes de communication. Ces tendances vont orienter les attentes de la génération Alpha en matière de technologie et influer sur leurs interactions avec le monde qui les entoure.
La génération Alpha est déjà très influencée par les technologies d’intelligence artificielle (IA) et certains appareils équipés d’une IA sont déjà destinés spécifiquement à cette génération : cet « internet des jouets » inclut des appareils qui intègrent des technologies de reconnaissance faciale ou vocale par exemple, à l’image des modèles Hello Barbie de Mattel. D’autres entrent dans les foyers sous la forme d’objets connectés et d’assistants intelligents tels que les produits Amazon Alexa et Google Home. Les jeunes générations prennent donc l’habitude de ces nouvelles formes d’interactions, et testent d’ores et déjà leurs possibilités et leurs limites. Les membres de la génération Alpha auront sans nul doute des attentes très fortes vis-à-vis de ces appareils intelligents, avec lesquels ils ont été en contact dès leur plus jeune âge.
L’interface vocale bientôt rivale de taille des écrans
Les appareils utilisent de plus en plus la reconnaissance vocale comme principal moyen de contrôle – les assistants tels que les enceintes connectées Amazon Alexa et Google Home tiennent là encore le haut du pavé. Bethany Koby, cofondatrice de Technology Will Save Us, fabricant de « jouets de type STEM » (acronyme qui signifie Science, Technologie, Ingénierie et Mathématiques), pense que la voix, en tant que moyen d’interaction, va influer sur les comportements des enfants de manières totalement inédites. Les écrans, dans leur essence mettent une barrière entre les hommes et l’environnement alentour, ce qui rend la technologie et son potentiel particulièrement intrusifs dans cette tendance qu’ils ont d’happer l’attention des enfants. La voix quant à elle est le cœur des interactions humaines et adresser des appareils, puis des marques par la voix permet de remettre l’humain, et ses facultés, au centre d’une relation avec la technologie.
Les algorithmes d’apprentissage automatique présents dans les assistants virtuels, ou objets connectés à interface vocale sont ainsi capables de cerner les modes d’interaction d’un utilisateur avec l’appareil au fil du temps, et de personnaliser l’expérience pour l’adapter à leurs besoins, chose jusqu’alors impossible avec les écrans.
Allons-nous voir la fin de l’écran en tant que canal marketing lorsque les membres de la génération Alpha deviendront majeurs ? La voix va-t-elle faire enfin son grand retour après des années de mise de côté par le mail et la messagerie instantanée ? C’est fort possible. Les contenus vidéo donnent satisfaction en termes de divertissement, mais lorsqu’il s’agit d’obtenir une réponse, la voix offre aux marques un moyen de communication direct avec l’utilisateur. Elle est vecteur d’engagement et gage d’une réelle pertinence tant personnellement que collectivement. Les marques ne doivent cependant pas oublier d’induire une certaine profondeur à leurs campagnes basées sur la commande vocale ; cela ne sert à rien de mettre en place un système vocal s’il est incapable de traiter une série de questions.
Comment les marques peuvent-elles anticiper cette tendance et capitaliser sur la voix pour engager la génération Alpha?
Pour rester pertinentes et attractives aux yeux des jeunes gens, les marques doivent être au fait des technologies émergentes. Même les marques peu portées sur la technologie doivent être vigilantes: la génération Alpha, en grandissant, sera attirée par celles capables de reprendre les codes qui leur inspirent confiance. Si ces futurs consommateurs ont été habitués à utiliser des assistants vocaux pour répondre à leurs questions les plus simples, et s’ils ont vu leurs parents commander à déjeuner via un assistant virtuel à interface vocale, ils attendront le même mode de fonctionnement dans d’autres domaines, comme par exemple pour le conseil puis l’achat d’une assurance pour leur voiture.
Plus important que d’être à l’écoute des technologies et de capitaliser dessus, les entreprises devront se focaliser sur un objectif : l’engagement. Avec les nouvelles réglementations en faveur de la protection des consommateurs, rechercher l’engagement avec ses clients sera la matrice la plus importante dans la réussite d’une campagne de communication ou de marketing. Et la voix est vectrice d’engagement : elle représente l’authenticité, trop longtemps mise de côté au profit d’une communication massive et peu personnalisée. A l’image du film HER, la voix dispose de cette capacité à placer le consommateur au cœur du processus de communication, en tant qu’individu et non pas en tant que membre d’une « vaste cible ». La voix rend les échanges entre entreprises et consommateurs plus naturels, plus réalistes.
La clé est de repenser les codes de la communication et de se pencher davantage sur le service.
Les assistants vocaux peuvent offrir de vraies opportunités pour les marques, de par leur aspect « pratique » et « utile ». Ils permettent en effet aux utilisateurs de commander directement et rapidement un produit au moment où ils en ont besoin. Les marques peuvent s’appuyer sur cette nouvelle plate-forme en proposant des services qui seront jugés « utiles » au lieu de sur-promouvoir leurs produits. Face à des clients qui ne souhaitent plus être contactés à des fins de marketing, proposer des services ou des informations utiles aux consommateurs peut aider les marques à se connecter durablement avec leurs audiences.
Nous n’atteindrons pas les membres de la génération Alpha avec la publicité traditionnelle (publicités sur des panneaux d’affichage, dans les points de vente ou en ligne). Pour y parvenir, il faudra s’adresser à eux quand ils en ont besoin, et leur conversation avec Alexa (et d’autres) peuvent nous y aider: lorsqu’ils demandent conseil pour un nouveau dentifrice ou quand ils cherchent une idée de recette de cuisine sur YouTube. Les marketeurs les plus téméraires, et qui feront peut-être mouche, vont élaborer des campagnes de communication subtiles qui ne mentionneront plus leur marque: leur contenu recommandera, par exemple, un repas qui répond aux attentes du consommateur, meme si cela signifie pour cela qu’il ne peut contenir aucun des ingrédients de la marque elle-même. C’est ce niveau de conseil, qui leur permettra de répondre à un besoin et à gagner la confiance de la génération Alpha. En créant un tel lien affectif dans la durée, nous donnerons naissance à une relation différente, très personnelle pour le consommateur.