La suspension du directeur de la rédaction de La Provence suscite des inquiétudes dans des titres de CMA CGM
Le directeur général de La Provence, Gabriel d'Harcourt met en retrait une semaine le directeur de la rédaction Aurélien Viers, indique un communiqué du quotidien, confirmant une information du syndicat SNJ majoritaire. La direction lui reproche sa "Une" du 21 mars composée d'une photo d'illustration et d’un titre reprenant une citation d’un habitant de Marseille : “Il (Emmanuel Macron, ndlr) est parti et nous, on est toujours là...". Cela a "pu laisser croire que La Provence donnait complaisamment la parole à des trafiquants de drogue décidés à narguer l'autorité publique”, précise le journal. Cette Une est apparue 48 heures après la visite surprise mardi du président de la République à Marseille, pour une opération "place nette XXL", décrite comme sans précédent contre le narcotrafic.
“Ce traitement ne reflète en rien les valeurs et la ligne éditoriale de La Provence. Cette "Une" a induit en erreur les lecteurs. Elle est contraire à l'éthique journalistique”, indique également le communiqué du titre racheté récemment par WhyNotMedia, le pôle média de CMA CGM détenu par Rodolphe Saadé. Un audit sur le “processus de fabrication de la "Une"”, doit être mené.
Les journalistes en grève illimité
Le Syndicat des journalistes dénonce des "pressions politiques" et a voté une grève illimitée pour réclamer la levée des sanctions contre M. Viers, arrivé début 2023 à la tête de la rédaction. Les explications de la direction sont "surréalistes", selon une représentante du SNJ : "On sait qu'hier (jeudi) il y a eu des pressions politiques et que Gabriel d'Harcourt a été convoqué à la tour", en référence au gratte-ciel du siège marseillais de l'armateur CMA CGM. Interrogé par l'AFP, M. d'Harcourt a réfuté toute pression. "C'est une décision que je prends, avec Jean-Christophe Tortora (patron de WhyNot Media, la filiale médias de l'armateur CMA CGM) et Laurent Guimier (patron de l'information de WhyNot Media)", a-t-il dit.
Le principe d'une grève à La Tribune/La Tribune Dimanche
Dimanche, la version papier de La Provence, comme annoncé sur son site, n'est pas parue tandis que dès vendredi, la rédaction de La Tribune/La Tribune dimanche a apporté son soutien "total" à ses confrères dans un communiqué. Se disant "solidaire" de leur grève illimitée et de leur motion de défiance à l'égard de la direction générale de La Provence et de celle de Whynot Media. Parlant d'un interventionnisme "inacceptable", le texte souligne que M. Saadé "vient de piétiner ses propres promesses de ne pas intervenir dans la ligne éditoriale de ses médias et de respecter l'indépendance des journalistes". Le communiqué précise par ailleurs que la rédaction de La Tribune/La Tribune Dimanche avait également voté la motion de défiance à l'encontre de Whynot Media ainsi que "le principe d'une grève pour mardi 26 mars". Elle demande enfin que, la concernant, le clause de cession de La Tribune "reste ouverte après le 31 mars 2024, date jusqu'à laquelle l'entreprise s'était engagée à ne pas la contester".
La présidente non exécutive de WhyNot Media, et la femme de Rodolphe Saadé, Véronique Albertini-Saadé possède le groupe La Provence (quotidiens régionaux La Provence et Corse Matin), possède depuis fin 2022 une part au sein du capital du groupe audiovisuel M6, puis, depuis début avril 2023, du média vidéo en ligne Brut. Le groupe a également le contrôle de La Tribune via le rachat du groupe Hima de M. Tortora. Dernier en date : vendredi dernier, il a annoncé le rachat d'Altice Media, qui comprend notamment BFMTV et RMC.