Fabien Namias (BFMTV) : "à trop chercher à imiter, on perd un peu de notre identité"

La chaîne info BFMTV installe une nouvelle grille à partir du 6 janvier. Rachetée en juillet par l'armateur CMA CGM, BFMTV est dirigée depuis fin septembre par Fabien Namias (ex-LCI), qui a succédé comme directeur général à Marc-Olivier Fogiel. Ces derniers mois, CNews lui a ravi à plusieurs reprises son statut de première chaîne d'information en continu de France en part d'audience, même si elle reste devant en audience cumulée (12,5 millions de téléspectateurs par jour, selon elle).

Avec son nouveau 20h, BFMTV va chasser sur les terres des grandes chaînes généralistes. D'une durée de deux heures (jusqu'à 22H00), il sera présenté par Maxime Switek du lundi au jeudi, puis par Alice Darfeuille du vendredi au dimanche, avec ces jours-là une case dédiée aux longs formats "Ligne rouge" à 21h. "20H BFM" remplace l'émission créée fin août pour concurrencer Pascal Praud (CNews), coanimée par Eric Brunet et Alice Darfeuille. Sur la tranche 09h-12h, précédemment occupée par Maxime Switek, BFMTV va installer une nouvelle émission du lundi au vendredi de 09H00 à 10H00. "Apolline de 9 à 10" sera présentée par Apolline de Malherbe, déjà aux commandes de l'interview de 08H30.

Elle sera suivie de 10h à midi par une nouvelle émission, "Le live BFM", présentée par Julie Hammett à partir du 3 février. Roselyne Dubois assurera l'intérim du 6 au 31 janvier. Autre nouveauté, l'arrivée à BFMTV de Guillaume Daret, jusque-là chef adjoint du service politique du groupe public France Télévisions. Il présentera la grande interview politique du dimanche à la mi-journée, "BFM politique", en plus de son rôle de chroniqueur dans "20H BFM".

Interview du directeur général Fabien Namias

Question : pourquoi cette nouvelle grille ?

Fabien Namias : "Le projet est assez simple. Avec Jean-Philippe Baille et Nicolas de Tavernost (directeur général délégué à l'information et PDG du groupe RMC BFM, ndlr), nous avons la conviction que BFMTV n'est jamais aussi forte que lorsqu'elle est sur ses fondamentaux: de l'information, du direct, des images, des exclusivités et du décryptage. La rédaction de BFMTV a une capacité de déploiement hors du commun, pour être sur le terrain partout et tout le temps. Quand BFM est sur le chaud, le news, elle est la meilleure et n'est pas rattrapable. C'est lorsqu'on se livre un petit peu trop au jeu de l'information en plateau, du débat permanent, de la polémique pour la polémique, qu'on perd en force."

Question : Face à la concurrence de CNews, BFMTV s'était-elle un peu écartée de ce modèle ?

Fabien Namias : "C'est l'une des conclusions que j'ai tirées et qui amène les modifications sur la grille. Ce qui est sûr, c'est qu'à trop chercher à imiter, on perd un peu de notre identité. En décembre, avec une actualité très forte - la politique, Notre-Dame, la chute du régime al-Assad en Syrie, le cyclone à Mayotte - BFMTV a été largement première chaîne d'information. Pourquoi ? Parce qu'on s'est concentré sur l'info chaude et qu'on y a mis les moyens de la rédaction. Quand on fait ça, on est premiers. C'est une leçon très forte."

Question : Sur l'année 2024, BFMTV et CNews ont fait jeu égal en part d'audience. Laquelle est leader des chaînes info ?

Fabien Namias : "Sur l'année, BFMTV est première sur les deux critères qui fondent l'audience. En audience cumulée (nombre de téléspectateurs par jour, ndlr), nous sommes à 12,6 millions contre 8,6 pour la chaîne suivante. En audience moyenne, nous sommes à 227 000 téléspectateurs qui regardent en permanence la chaîne, contre 225 000 pour notre concurrent principal. Ça donne une égalité en part d'audience (2,9%, ndlr), mais en audience moyenne, BFMTV est devant. Ça n'est pas énorme, mais on est premier, d'une courte tête. BFMTV a les atouts pour conserver son leadership, même si c'est disputé. C'est à la fin de la saison qu'on pourra avoir les premiers effets de ce que nous lançons."

Question : Pourquoi lancer un JT de 20h pour remplacer l'émission de débats d'Eric Brunet ?

Fabien Namias : "On change pour proposer au public un programme emblématique de ce que sait faire BFMTV : de l'info, chaude et hiérarchisée. Chaque soir, entre 11 et 13 millions de Français regardent les deux grands journaux de 20h (sur TF1 et France 2, ndlr). C'était un peu étonnant que BFMTV ne propose pas un grand rendez-vous d'information à cette heure-là. Le format va emprunter aux grands journaux traditionnels et à ce qu'on voit aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne, avec une écriture et une modernité propres à BFMTV. Il sera porté par Maxime Switek du lundi au jeudi puis Alice Darfeuille du vendredi au dimanche, et offrira pendant deux heures une multitude de séquences diversifiées."

Question : Comment décrire l'autre grosse nouveauté, "Apolline de 9 à 10" d'Apolline de Malherbe ? 

Fabien Namias : "Ça restera une émission d'info, avec plus de place au débat, au décryptage, à l'approfondissement, que dans la matinale, où c'est priorité à l'image et au direct. Ce qu'on essaye de faire, c'est créer des ruptures de rythme, pour que la chaîne ne soit pas monocolore du matin au soir."

Question : Depuis le rachat, des craintes ont émergé sur un supposé interventionnisme de Rodolphe Saadé, patron de CMA CGM. Qu'en est-il ? 

Fabien Namias : "C'est du fantasme. Je n'ai pas connu la moindre intervention depuis que je suis là. CMA CGM est le propriétaire de BFMTV, et c'est tant mieux que des groupes qui ont une assise financière continuent à croire en l'information et à investir, pour avoir une information fiable et de qualité."