Le sourire et les larmes
On en apprend sur soi-même tout au long de sa vie… Pas de panique, ce n’est pas le premier sujet de dissert de philo de la rentrée. C’est une simple réalité que j’ai vérifiée récemment en constatant que lorsqu’on me communique une information très importante, me concernant ou pas, bonne ou mauvaise – mais plutôt mauvaise —, je ne la comprends pas. Frappé par une sorte de sidération mentale mon cerveau peut mettre jusqu’à plusieurs jours pour l’intégrer et en tirer les conséquences. Ainsi cette semaine j’ai déjeuné avec un ami que je n’avais pas vu depuis longtemps et que je félicitais pour son allure, plus élégante que jamais. Et il me répond en souriant que la raison de cette transformation est la proximité du mariage de son frère. Et il ajoute dans un sourire que la cérémonie risque d’être reportée dans la mesure où elle devait se tenir en Israël. Et je souris aussi. Bêtement. C’était quelques heures avant que les massacres de Kfar Aza et des autres kibboutz ne soient révélés. Avant de voir des reporters de guerre retenir leurs larmes pour décrire ce qu’ils avaient vu. Avant le meurtre absurde d'un enseignant. Et je n’ai plus retenu les miennes. Jusqu’à ce que vous lisiez ce texte, j’ai gardé cette émotion pour moi, sans la partager sur les réseaux sociaux. Parce que je ne sais pas réagir à de telles atrocités, à une perversion de l’humanité par un émoji ou un pouce baissé. Il y a longtemps que je pense que le monde est trop complexe pour le commenter ou l’expliquer par des posts ou des images, fussent-elles fortes ou émouvantes. Sans oublier qu’elles peuvent être trompeuses. J’ai la chance de pouvoir exprimer dans ces quelques lignes les méandres de ma pensée mieux que je ne le saurais faire par une simple interaction. Cela n’empêche ni l’indignation, ni la tristesse, ni même la colère.