Les jeunes ruraux veulent-ils quitter leur territoire ?

Jeune rurale

Les enjeux de mobilité empêchent des millions de jeunes de réaliser leur potentiel.

Un peu plus d’un quart (26%) des jeunes français de 15 à 29 ans vivent dans des communes rurales, celles-ci étant définies selon une approche originale de l’Ifop, l’Institut Terram et Chemins d’avenirs, liée directement à la densité de population des communes*.

Parmi eux, les 18 ans et plus passent en moyenne 2h37 dans les transports chaque jour. Soit 42 minutes de plus que les jeunes urbains majeurs (1h55). Soit autant de temps en moins chaque jour pour les loisirs culturels, la pratique sportive ou encore le temps en famille.

À la problématique des kilomètres parcourus s’ajoute une offre de transports en commun insuffisante : 53% des jeunes ruraux déclarent être mal desservis par le réseau de bus et 62% par le train, contre seulement 14% et 24% chez les jeunes urbains. Ce qui provoque une dépendance à la voiture : 69% des jeunes ruraux dépendent d’elle quotidiennement, contre 31% des urbains. Une dépendance qui entraîne une fragilité dans le domaine du travail : 67% des jeunes ruraux âgés de 25 à 29 ans se disent en risque de perdre leur emploi si leur mode de transport actuel est compromis ; 38% des jeunes ruraux en recherche d’emploi disent avoir déjà renoncé à passer un entretien en raison de difficultés de déplacement ; 45% des jeunes ruraux en poste ont déjà rencontré des difficultés pour se rendre au travail en raison de l’éloignement ou de problèmes de transport. Cet enjeu de mobilité se retrouve dans tous les domaines : les jeunes ruraux sont contraints par la distance pour se rendre en cours, s’engager dans une association, faire les courses, effectuer une démarche administrative, recevoir des soins, pratiquer des activités culturelles…

Alors, rester ou partir ?

Malgré ces difficultés, près d’un jeune rural sur deux désire rester dans son territoire (48%) tandis qu’ils sont 52% à vouloir le quitter. En comparaison, les jeunes urbains sont moins nombreux à vouloir rester dans leur lieu d’origine (41%, contre 59% qui souhaitent bouger). Plus le niveau de vie des jeunes ruraux est élevé, plus forte est la volonté de rester : celle-ci concerne 55% des jeunes ruraux aisés contre 43% de ceux issus de milieux populaires.

L’étude éclaire ainsi cet ancrage dans les territoires : « 8 jeunes ruraux sur 10 ont passé les dix premières années de leur vie à la campagne ou dans une petite ville, on comprend qu’ils hésitent à franchir le pas vers une grande ville coûteuse sur les plans financier et matériel. Et, de fait, la grande majorité de ces jeunes se projettent dans un territoire similaire au leur : 63% d’entre eux disent souhaiter vivre leur vie d’adulte en milieu rural – dans le détail, davantage à la campagne (43%) que dans une petite ville (20%). Ces préférences contrastent nettement avec celles des jeunes urbains, beaucoup plus libres dans leur façon d’envisager leur territoire futur : 29% envisagent de vivre dans une ville moyenne, 22% dans une grande ville, 18% à la campagne, 17% dans une petite ville et 14% à l’étranger. Les jeunes urbains sont de fait beaucoup plus libres d’aller chercher la formation, puis l’emploi, là où ils se trouvent. »

Mettre en adéquation

Dans son résumé, l’étude de l’Institut Terram et Chemins d’avenirs souligne que « traiter de cet enjeu de la mobilité en ruralité, ce n’est pas faire preuve de misérabilisme à l’égard des territoires ruraux. Bien au contraire, c’est permettre aux acteurs locaux et nationaux de proposer aux jeunes une mise en adéquation entre goût pour la campagne et aspirations professionnelles. C’est tenir compte d’une situation individuelle et collective qui, à ce jour, empêche des millions de jeunes Français de réaliser leur potentiel. C’est enfin pouvoir prétendre à une véritable égalité des chances en France. »

* Méthodologie : Pour définir les ruraux, l’Ifop a choisi une approche originale dans laquelle les territoires ruraux correspondent aux communes « peu denses » et « très peu denses », soit 88% des communes et un quart des jeunes de 15 à 29 ans (26%), contrairement à l’approche habituelle du rural centrée sur la ville – où les communes rurales sont définies comme celles n’appartenant pas à une unité urbaine. L’étude est consultable sur le site de l’Institut Terram et la méthodologie sur le site de l’Ifop.

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