Carine Fouteau (Mediapart) : « notre modèle d’indépendance suscite la confiance »

Carine Fouteau

Carine Fouteau

(© © Sébastien Calvet - Mediapart)

Le site d’investigation est portée par une nouvelle année de résultats positifs et des objectifs à atteindre.

Mediapart poursuit sa progression avec 24,9 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2024, soit une hausse de 11,4% sur un an. Lancé en 2008, le site d’investigation affiche un bénéfice net de 3,3 millions d’euros. Le nombre d’abonnés connaît également une belle progression avec environ 233 277 (+6% par rapport à 2023). Des résultats positifs qui s’expliquent par le modèle économique du média : « notre modèle d’indépendance suscite la confiance », souligne Carine Fouteau, présidente et directrice de la publication, lors d’une conférence de presse mardi. Celle qui a succédé l’année dernière au cofondateur Edwy Plenel met en avant une information produite sans censure ou autocensure, sans revenus publicitaires, ni d’actionnaires interventionnistes ou encore d'accords commerciaux avec les GAFAM (Google…). 

L’un des objectifs est de garantir la pérennité de cette indépendance. Le site ne compte actuellement aucun actionnaire, et dépend du Fonds pour une presse libre (FPL) à travers la Société pour la protection de l’indépendance de Mediapart (SPIM). Depuis 2023, Mediapart a aussi construit des réserves à hauteur de 3 millions d’euros. Près de 99 % des revenus du média proviennent de ses abonnements. Le panier moyen par abonné est environ de 8,40 euros. 

La direction anticipe des marges de progression importantes pour son journal “dans un monde plus troublé que jamais avec l’extrême droite qui se lie à la tech contre les valeurs de liberté, la déferlante des fakes news, les guerres aux portes de l’Europe et les bouleversements géopolitiques...", estime Carine Fouteau.

Rapport d’impact

Pour démontrer son utilité au sein de la société, Mediapart a mis en ligne le 11 mars un rapport d’impact. Le document recense les diverses enquêtes réalisées par la rédaction et leurs impacts. “Certaines de nos révélations ont abouti à l’ouverture de procédures judiciaires et à des condamnations, à la création de garde-fous démocratiques comme le Parquet national financier ou la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, à des amendements, voire des lois, comme celle qui a interdit le financement des partis politiques français par des banques extra-européennes, à la démission de responsables politiques ou encore à des amendes infligées à des entreprises, ramenant ainsi des centaines de millions d’euros dans les caisses de l’État.” 

Côté éditorial, le pureplayer entend renforcer sa couverture des sujets politique et international, ainsi qu’être à l’écoute de nouveaux champs d’enquêtes comme le droit des enfants. Récemment, le média a par exemple créé un poste de responsable des questions raciales tenu par Sabrina Kassa. Une newsletter « La lettre antiraciste » sera bientôt lancée. Le site compte augmenter ses chroniques comme celle sur les jeux vidéos et son offre vidéo avec en modèle l’émission de l’ex recrue de France inter, l'humoriste Guillaume Meurice. “il faut aussi avoir ce type de respiration dans l’actualité”, commente Lénaïg Bredoux, codirectrice éditoriale Mediapart et responsable aux questions de genre. De façon globale, les formats audio et vidéo seront accentués. “Nous avons en tête l’usage de l’information en mobilité”, glisse Carine Fouteau. 

Personne n'y comprend rien 

Autre réussite : Mediapart a récemment surfé sur le succès de son premier film “Personne n’y comprend rien”. En avril dernier, la rédaction a ouvert une campagne de dons pour financer ce documentaire sur l’affaire Sarkozy-Kadhafi. L'appel aux dons avait pour objectif de réunir 150 000 euros, mais c’est finalement 500 000 euros qui sont récoltés. Près de 10 000 participants ont donné en moyenne 50 euros. Révélée par Mediapart, l’affaire porte sur des soupçons de financement libyen par l'ancien dictateur Mouammar Kadhafi de la campagne en 2007 de l’ancien président Nicolas Sarkozy. Le procès s’est ouvert en janvier 2025. La sortie de ce film au début de l’année permet de “ne pas rater l’ouverture d’un procès historique”, commente le journaliste Fabrice Arfi. Mais l’idée est avant tout “d’offrir un manuel aux citoyens”. Son confrère Michaël Hajdenberg complète “ nous avions l’impression de ne pas percer le mur de la connaissance avec cette affaire… Le réalisateur Yannick Kergoat a su apporter la simplicité, rendre cette affaire compréhensible”. 

Selon Mediapart, le film a attiré 150 000 spectateurs en salles. Produit par Jour2Fête, il a été distribué la première semaine dans 40 salles, avant de passer à 400 copies, puis à une cinquantaine aujourd’hui. Le long-métrage sera disponible en VoD le 8 mai, puis en DVD dès le 20 mai. En dehors de cette réussite dans les cinémas, le long-métrage a permis à Mediapart de gagner 8 000 abonnés net, à l’aide d’une offre marketing. Le nombre d'abonnés s’élève ainsi au mois de mars 2025 à 245 000 fidèles.

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