Les éditeurs de jeux vidéo dans le collimateur des organisations de défense des consommateurs
Des organisations de défense des consommateurs ont annoncé jeudi avoir déposé une plainte auprès de la Commission européenne contre "les pratiques déloyales" des éditeurs de jeux vidéo qui poussent les joueurs, notamment les enfants, à dépenser plus.
Des entreprises comme Epic Games (Fortnite), Supercell (Clash of Clans) ou Electronic Arts (EA Sports FC 24) sont accusées de recourir dans leurs jeux à des monnaies virtuelles, sous la forme par exemple de gemmes ou de pièces, pour tromper les consommateurs. Ces monnaies, vendues en ligne, permettent ensuite d'acheter des objets ou des options de personnalisation à l'intérieur des jeux, tout en masquant les coûts réels pour les utilisateurs, déplorent les organisations plaignantes. Les monnaies virtuelles "trompent délibérément" les joueurs, en particulier les plus jeunes, estime Agustin Reyna, directeur général du Bureau européen des unions de consommateurs (Beuc). Cette fédération s'est associée à 22 organisations membres de dix-sept pays, dont UFC-Que Choisir en France, Vzbv en Allemagne, Testachats en Belgique et la FRC en Suisse, pour alerter la Commission européenne. "Les entreprises sont parfaitement conscientes de la vulnérabilité des enfants et utilisent des astuces pour inciter les jeunes consommateurs à dépenser davantage", affirme M. Reyna.
Un peu plus d'un Européen sur deux se distrait avec des jeux vidéo, un taux qui monte à 84% chez les 11-14 ans. Les enfants dépensent près de 40 euros par mois dans des achats à l'intérieur des jeux vidéo, estime le Beuc. Sept grands éditeurs, dont Activision Blizzard et Ubisoft, "enfreignent les lois européennes sur la protection des consommateurs", affirment les associations de consommateurs. Elles appellent les autorités à "s'assurer que les entreprises respectent les règles" et souhaitent aussi des législations plus strictes dans les années à venir. Déplorant le "manque de transparence" induit par les monnaies virtuelles, elles réclament en particulier que les prix des objets vendus à l'intérieur des jeux soient exprimés "en monnaie réelle". "Les joueurs ne devraient pas avoir besoin d'une calculatrice chaque fois qu'ils souhaitent prendre une décision éclairée sur le montant qu'ils veulent dépenser (...). Les pratiques trompeuses doivent cesser", plaide Agustin Reyna. L'achat de monnaie virtuelle dans les jeux "est une pratique bien établie et bien comprise par les joueurs", estime au contraire Video Games Europe, organisation qui représente les développeurs. "Nos membres respectent toujours les lois européennes sur la consommation dans la manière dont ils proposent ces achats", assure-t-on de même source.
Video Games Europe souligne par ailleurs que le financement des éditeurs par les achats à l'intérieur des jeux permet aussi d'offrir des produits gratuits, ces achats restant optionnels. "Les joueurs peuvent découvrir des jeux entiers sans dépenser d'argent, leur offrant ainsi l'opportunité d'essayer des jeux sans coût initial ni engagement". La Commission européenne a confirmé de son côté avoir reçu l'alerte du Beuc. "Nous analysons actuellement les éléments présentés par cette organisation et nous travaillerons en collaboration avec les autorités nationales de protection des consommateurs avant de décider des prochaines étapes", a déclaré la porte-parole Jördis Ferroli, lors d'un point presse. En 2020, les achats à l'intérieur des jeux ont généré plus de 50 milliards de dollars (46 milliards d'euros) et leur part dans les revenus des éditeurs n'a cessé d'augmenter ces dernières années, selon le Beuc.