Instagram s'engage sur la protection des adolescents devant le Congrès américain
Le patron d'Instagram, Adam Mosseri, a donné mardi quelques gages sur la protection des adolescents, à la veille de son audition sur le sujet au Congrès, qui s'annonce tendue. L'ancien entrepreneur qui dirige Instagram depuis trois ans n'a pas annoncé de modification majeure mais plutôt une série de changements « pour que les jeunes soient encore mieux protégés sur Instagram ». L'application va notamment empêcher les utilisateurs de mentionner dans leurs publications des ados qui ne sont pas abonnés à leur profil. Elle avait déjà rendu les comptes des mineurs privés par défaut quand ils s’inscrivent. Le réseau social va aussi proposer, en mars prochain, des outils pour permettre aux parents de voir combien de temps leurs enfants passent sur l'appli et instaurer des limites. Ils auront prochainement accès à un centre d'informations avec des tutoriels et des conseils d’experts.
Autre nouveauté, Instagram lance, sur tous les grands marchés anglophones, la recommandation « Fais une pause », qui suggèrera à un jeune utilisateur de suspendre un moment sa consultation de l’appli. Pour qu'elle devienne récurrente, il appartiendra néanmoins à l’adolescent d'activer cette option, qui ne sera pas installée par défaut. Adam Mosseri a aussi annoncé l'apparition, en janvier, d'un nouvel espace au sein de l'application qui permettra aux adolescents de passer en revue toute leur activité sur Instagram, des contenus postés aux commentaires, en passant par les « likes », et éventuellement d'en supprimer une partie, afin de leur permettre de « gérer plus facilement leur empreinte numérique ».
« C'est une annonce creuse » pour « faire diversion », a réagi la sénatrice républicaine Marsha Blackburn, cheffe de file des républicains à la sous-commission sénatoriale à la Protection des consommateurs, qui va entendre Adam Mosseri mercredi. « Mes collègues et moi-même voyons très bien ce qu'ils font. Nous savons que Meta et ses alliés de la Silicon Valley vont continuer à pousser le bouchon par égoïsme et cupidité tant qu'ils le peuvent. » Fin septembre, le groupe californien avait mis sur pause son travail sur une version d'Instagram pour les moins de 13 ans, mais n'y a pas renoncé. « Je continue d'accueillir favorablement une collaboration productive avec les législateurs en vue d'accomplir notre objectif commun : créer un monde en ligne qui bénéficie aux générations futures tout en les protégeant », a expliqué Adam Mosseri.
L'image d'Instagram et de sa maison mère Facebook, depuis rebaptisée Meta Platforms, ont été largement ternies par la lanceuse d'alerte Frances Haugen, une ex-employée de Facebook qui a fait fuiter cet automne des documents internes. Ils montrent que les dirigeants avaient conscience de certains risques pour les mineurs, notamment pour la santé mentale de certaines jeunes filles confrontées, image après image, au mythe du corps féminin idéal. « Après les rapports explosifs sur les impacts toxiques d'Instagram, nous voulons entendre directement les dirigeants de l'entreprise », a tweeté la semaine dernière le sénateur démocrate Richard Blumenthal, qui a déjà interrogé Antigone Davis, responsable de la sûreté chez Facebook. « Tous les jours, je vois l'impact positif qu'a Instagram sur la jeunesse partout dans le monde », a déclaré Adam Mosseri dans le communiqué de l'entreprise publié mardi. Mi-septembre, en réponse au scandale, Instagram avait dit réfléchir à un système qui encouragerait les utilisateurs à ne pas s'appesantir sur certains contenus.
« Nous aurons bientôt plus d'infos à partager là-dessus, et sur des changements en matière de recommandations aux adolescents », a assuré Adam Mosseri mardi. Lors de ses nombreuses auditions devant des Parlementaires de plusieurs pays, dont ceux de la même commission sénatoriale qui entendra Adam Mosseri, la lanceuse d'alerte Frances Haugen avait réclamé à Facebook et Instagram de partager le produit de leurs recherches sur les effets de ces plateformes sur leurs utilisateurs. C'est également ce qu'ont demandé une dizaine d'universitaires du monde entier dans une lettre ouverte à Mark Zuckerberg, publiée lundi et signée par plus de deux cents de leurs pairs. « Nous vous demandons de solliciter un examen indépendant et transparent de toutes vos recherches passées, présentes et futures sur la santé mentale des enfants et des adolescents », ont écrit les auteurs. Frances Haugen a aussi demandé, dans ses interventions, à Facebook et Instagram de modifier leurs algorithmes afin que, selon elle, la durée d'utilisation des plateformes et le nombre d'interactions ne soient pas les seuls critères pertinents.