Conseil en choix d’agence : le marché vu par… Thomas Sabatier (Pitchichi)

sabatier

Business clé pour les agences et les annonceurs, le marché du conseil en choix d’agence a connu et subi, comme tout l’écosystème de la communication, la crise sanitaire. L’opportunité pour CB News d’aller à la rencontre de ces entreprises pour faire un état de lieux et dresser quelques perspectives. Après Gilles Fraysse, président-fondateur de Happy Match, Fabrice Valmier, co-dirigeant du groupe VT Scan, Pitchville pour une interview à trois voix avec Marie-Charlotte Longueville et Stéphanie Pitet, cofondatrices, et Jean-Philippe Gilbrain, chargé du développement, place aujourd’hui à Thomas Sabatier, fondateur de Pitchichi.

CB News : Avec la crise sanitaire qui perdure, quelle perception avez-vous des annonceurs vis-à-vis des compétitions d’agences ? Fébrilité ? Attentisme ? Volontarisme ?

Thomas Sabatier : Ce qu’on perçoit c’est plutôt du volontarisme. Pitchichi est une société de conseil en choix d’agences créée peu de temps avant le début de la crise sanitaire donc les éléments de comparaison sont peu nombreux. Ceci-dit, j’ai l’impression que quand une entreprise vient nous voir, c’est qu’elle a envie de faire de belles choses, qu’elle souhaite aller de l’avant, être active, échanger avec ses consommateurs et la société pour montrer qu’elle est là, à leurs côtés, qu’elle joue pleinement son rôle et prend ses responsabilités. On sent du positivisme, une vraie envie d’apporter quelque chose aux gens. C’est cette énergie positive qu’ils viennent chercher chez nous et chez les agences que nous leur recommandons.

Après, il y a tous ces secteurs durement touchés par la crise, chez qui il y a, par la force des choses, une certaine forme de fébrilité et d’attentisme par rapport à une situation dont on ne connait toujours pas réellement l’issue. Je pense notamment aux secteurs de l’hôtellerie, de la restauration, du tourisme ou du transport aérien, qui malheureusement sont encore dans le flou, en train de tout faire pour limiter la casse. Tous ont sûrement en interne ou avec leurs agences, déjà pensé à plusieurs plans d’action et seront certainement prêts à reprendre la parole quand ils auront davantage de visibilité et que le moment sera le bon.

Après, il y aura, je pense, parmi les consommateurs, deux types de comportement opposés, avec d’un côté, ceux qui n’auront qu’une envie : revivre, quitte à être dans l’excès, et de l’autre, ceux chez qui il y aura encore de la crainte et qui mettront plus de temps à retrouver leur vie d’avant.

CB News : Quels sont les constats et les attentes/demandes des annonceurs pour leurs communications ?

Thomas Sabatier : Il y a cette réalité qui n’est pas facile et effectivement, certains budgets sont moins importants que d’habitude, parce qu’il faut prendre des précautions ou parce que les recettes ont diminué. Mais il y a aussi cette idée qu’il faut continuer à vivre et peut-être plus que jamais à communiquer. Ces « nouvelles » contraintes de vie peuvent aussi créer des opportunités qu’il faut savoir mettre en lumière et permettre aux gens de saisir.

Globalement, je perçois que les marques ont envie de transmettre des  « good vibes », d’apporter de la légèreté dans cette situation qui est pesante. Aussi bien pour Feu Vert que pour Atlantic, nos deux dernières missions, c’est l’humour qui l’a emporté. On sent qu’on a tous besoin de se détendre, de s’évader et que ça fait du bien une pub qui nous fait rire.

Concernant les attentes, je dirais que les annonceurs cherchent à avoir une communication qui fasse sens par rapport à la situation et qu’ils attendent qu’on leur présente des gens brillants capables de les comprendre et d’être le prolongement de leur entreprise pour retranscrire leur position, leurs actions, leurs propositions de valeur, avec le bon ton, les mots justes, et surtout avec la bonne idée, voire l’idée géniale.

CB News : Le conseil en choix d'agences a-t-il spécifiquement évolué avec la crise sanitaire ? Et même à l’aune des thématiques prégnantes comme la RSE, l’éthique ou encore la transition écologique ? Cela devient plus complexe ?

Thomas Sabatier : Encore une fois, Pitchichi a été lancé environ 1 an avant le début de la crise sanitaire donc on a peu d’éléments de comparaison. Si le conseil en choix d’agences a changé avec la crise sanitaire, je dirais que non. Pour moi c’est la société qui a évolué. Le conseil, c’est d’être à l’écoute de son client donc cela ne change pas. Sur l’aspect RSE, il faut faire attention parce que c’est devenu à la mode et que tout le monde se vante d’être plus responsable que les autres, de « laver plus vert que vert ». Les gens ne sont pas dupes et les entreprises savent que leur salut viendra de mesures concrètes, de services et de produits nouveaux qui répondent aux attentes ou qui les anticipent. Ce sont les actes qui doivent être à l’origine des prises de parole et non l’inverse. Ce qui est intéressant, c’est qu’ensuite ça provoque des prises de conscience, des changements de mentalité et de comportement qui eux-mêmes provoquent de nouveaux changements au sein des entreprises. C’est un cercle vertueux dont la communication a la chance de faire partie, réjouissons-en nous et faisons les choses bien.

Pour en revenir au conseil en choix d’agences, je dirais que, soit la RSE est au cœur de la stratégie de l’entreprise et de manière évidente, tout l’appel d’offres va s’articuler autour, soit ce n’est pas le cas et finalement on en parlera peu ou pas. Ce sera davantage un sujet que l’agence abordera avec l’annonceur une fois que la relation aura commencé. Notre rôle est d’aider les annonceurs et les agences à définir un cap pertinent puis à le tenir avec force et conviction.

CB News : Comment décririez-vous la relation agence-annonceur aujourd'hui ?

Thomas Sabatier : Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a pas une relation agence-annonceur, il y en a des millions. Ceci-dit, il est de la responsabilité de l’annonceur de savoir ce qu’il attend de son agence. Pour certains, l’aspect humain, relationnel, va être très important et donc déterminant, tandis que pour d’autres, c’est plus le résultat qui compte, peu importe finalement la manière ou ce qu’il en coûte. Pour sortir des campagnes brillantes qui marqueront les esprits, certains sont prêts à travailler avec de fortes personnalités qui seront peut-être plus radicales que d’autres dans leur manière de dire ou de faire. Attention, je ne dis pas qu’on ne peut pas être à la fois brillant et particulièrement sympathique et à l’écoute. Parfois, ça arrive (rires).

L’avantage du processus d’appel d’offres, c’est qu’il est progressif. Organiser une compétition d’agences permet de se rendre compte au fil des étapes de ce qu’on veut et ce d’autant plus qu’on passe par un cabinet externe. En effet, notre rôle est de préserver cette si précieuse relation annonceur-agence. Nous sommes là pour mettre tout le monde dans les meilleures dispositions et rendre cette aventure créative, par nature un peu anxiogène, aussi agréable et passionnante que possible. Grâce à nous, les clients n’ont plus qu’à se concentrer sur eux, leur marque, leurs objectifs, et sur les agences, les personnalités qu’ils rencontrent, les idées qu’ils échangent. J’ai la conviction qu’il y a une grande part d’inconscient dans la manière dont le rapprochement avec l’agence s’opère. La magie des compétitions d’agences, c’est qu’on passe quasiment sans s’en rendre compte d’une quinzaine d’agences (la première « long-list ») à une seule, l’agence vainqueur. Celle qu’on choisit et qui nous a choisi, car une bonne relation annonceur-agence, ça marche toujours dans les 2 sens.

CB News : Comment se porte Pitchichi aujourd'hui ?

Thomas Sabatier : Pitchichi va bien. Pitchichi grandit. On ne peut pas refaire l’histoire et on ne sait pas si ça aurait été plus simple sans cette crise sanitaire mais on a l’impression de trouver un écho très favorable sur le marché par rapport à notre proposition qui est nouvelle. Ce regard neuf sur la relation annonceur-agence, le fait d’aborder ce choix d’agences par le prisme de la créativité qui est pour moi l’élément déterminant, celui qui rend les marques fortes et pérennes. Les annonceurs trouvent ça bien d’avoir un expert en création à leurs côtés pour leur apporter cet éclairage supplémentaire et leur permettre de prendre les bonnes décisions à chaque étape de leur pitch. Et puis, on a le sentiment que les agences aussi sont contentes d’avoir quelqu’un en face qui vient de la création, qui soit capable d’échanger avec elles de manière plus constructive.

À côté du cabinet de conseil, on a développé pour les plus petits budgets, une plateforme digitale de recommandation d’agences qui nous permet d’offrir au plus grand nombre d’entreprises notre expertise, notre connaissance du marché. Grâce à nous, beaucoup de directeurs marketing/communication avancent plus vite et de manière plus pertinente dans leurs recherches d’agences. Ici, notre rôle s’arrête au conseil, nous ne nous occupons pas de l’organisation. On agit sur un spectre plus large d’expertises : du branding jusqu’au social media en passant par le digital et la communication 360. Ce qui est super, c’est que ça nous permet de traiter une grande diversité de problématiques et donc d’avoir une connaissance encore plus vaste du marché pour y dénicher de nouvelles tendances, de nouveaux talents et pour permettre aussi à des agences qui le méritent de se développer plus rapidement. Bref, je suis ravi de ce nouveau rôle de « guide » avec Pitchichi, où nous sommes au service de toute notre industrie (annonceurs et agences) et où l’enjeu créatif est majeur et donc passionnant.

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