Amélie Chabrol (Enderby) : « Ecouter un podcast, c’est presque un moyen de penser à demain »
Pendant ce confinement, les voyants autour du podcast sont au vert. Médias et marques s’en saisissent, dans le but d’améliorer leurs audiences ou leur notoriété. Entretien avec Amélie Chabrol, directrice éditoriale d’Enderby, à l’origine des podcasts réalisés par le cabinet.
Comment le podcast est-il considéré chez Enderby ?
Nous avons lancé notre propre podcast « Cols blancs Culottes courtes », sur l’enfance des dirigeants, en septembre 2019, cela faisait déjà quelques mois que nous étions convaincus que ce format était en train de révolutionner la communication des entreprises et de leurs dirigeants.
À l’origine et plus largement, c’est la voix qui nous semblait être un excellent moyen de faire passer des messages, différemment, de manière plus intime, on avait constaté cette tendance dans nos manières de consommer et de nous informer. Le podcast a donc été le prolongement naturel de cette réflexion. Un pas de plus vers cette nouvelle forme de communication, dans l’ère du slow, de l’intime, du temps long, de la réflexion.
Est-il d’abord un outil de communication interne ou externe ?
Il peut tout à fait remplir les deux offices. Les interlocuteurs choisis pour être mis en valeur dans les épisodes ainsi que les sujets traités vont faire la différence. Si ce sont plusieurs collaborateurs, des équipes variées, qui racontent par exemple leur quotidien, cela sert indéniablement l'attachement à l’entreprise, et donc la communication interne. Si le dirigeant est amené à témoigner, dans un podcast où d’autres dirigeants d’entreprises participent, cela va davantage servir l’externe.
Par ailleurs, le dispositif de valorisation de chacun des épisodes est important pour développer l’un ou l’autre des versants de la communication. Plus il est grand public - réseaux sociaux de l’entreprise, relais des collaborateurs - plus il servira la communication externe. Plus les canaux de diffusion sont internes (intranet de l’entreprise par exemple), plus il sera un instrument pour l’interne.
Le confinement privilège-t-il davantage ce format, selon vous ?
En tout cas les chiffres explosent concernant l’écoute des podcasts : 46% des Français déclarent en écouter plus depuis le début du confinement (enquête Happydemics du 28 avril). On vit une période où les gens ont du temps, pour soi, pour penser, se poser, et le podcast est justement un outil idéal pour cela. Il permet de se recentrer et d’écouter une émission au long cours, sans être interrompu par de la publicité, des images, des écrans. Cet attrait que nous commencions à avoir, et ce temps que nous prenions dans les transports pour écouter des contenus audio comme les podcasts, nous l’avons donc amplifié à la maison, pour répondre à un besoin de temps pour soi, isolé du reste de la cellule familiale.
Par ailleurs, les contenus des podcasts sont à l’opposé de la culture du news, voire du hard news, dont beaucoup d’entre nous souffrons, particulièrement dans la période si anxiogène et incertaine que nous traversons, ils permettent donc de s’échapper du quotidien et de projeter son esprit et ses réflexions au-delà du présent. Ecouter un podcast, c’est donc presque un moyen de penser à demain.
Que proposez-vous à vos clients chez Enderby ?
Nous les écoutons d’abord… Comment se vivent-ils ? Comment parlent-ils d’eux ? Que font-ils ? Qu’ont-ils envie de raconter ? En fonction de leurs envies, ce qu’ils sont, mais aussi leurs objectifs, nous leur proposons des contenus ad hoc, complètement personnalisés, qui vont exprimer leur ADN.
Un dirigeant veut parler à ses équipes ? Une entreprise aimerait valoriser un savoir-faire en externe ou un engagement ? Notre réponse ne sera pas la même… Nous cherchons quelle ligne appliquer, quels interlocuteurs solliciter, quel format préférer, et créons un concept unique, avec des épisodes, une identité sonore, une ligne éditoriale, et tout un plan de communication pour faire connaitre et diffuser les contenus qui seront réalisés. C’est un processus vraiment créatif, car cela peut prendre de multiples formes (interviews, récits, fiction etc.), et aussi très libre, nous ne nous interdisons rien pour répondre au mieux à leurs besoins.
Est-ce le bon moment réaliser un podcast selon vous ?
Pour les entreprises, c’est le bon moment pour réfléchir plus globalement à ce qu’elles sont, ce qu’elles veulent faire, où elles vont, et surtout et c’est le maitre mot des enseignements de cette crise, ce à quoi elles servent, leur « utilité ». Une fois cette réflexion amorcée avec elles, on peut se demander comment faire vivre cette ambition post-crise dans un podcast, avec quel concept, quels invités, quelle forme… Nous travaillons donc actuellement avec plusieurs entreprises sur leur prochain podcast, qui sortira après cette crise, voire même « qui sortira de cette crise ». Le temps est à la préparation pour être prêt pour l’après.
A quel point la marque doit-elle être visible dans le contenu ?
De manière transparente et claire, mais sans répétition. Tout l’inverse d’une publicité je dirais ! Le plus important est de prévenir l’auditeur de l’origine du contenu, son appartenance, ensuite, le contenu est roi, le fond, la narration, le récit…
La marque doit s’effacer au profit de ce qu’elle véhicule, ce qu’elle apporte. C’est d’ailleurs l’une des forces du podcast, mettre en avant le contenu, plus que la marque, et certainement la condition sine qua non d’un attachement du public au podcast et in fine à la marque qui est derrière, celle-ci doit être discrète et… utile.
Le podcast est-il le moyen miracle pour rester connecté avec son audience, ses clients ou encore sa communauté ?
C’est un moyen de rester connecté durablement et fidèlement. Quand on crée un podcast, on crée une série d’épisodes récurrents, marquants, différenciants, tout l’inverse d’un contenu vidéo parfois fugace, perdu au milieu d’une timeline, elle-même perdue dans une foule d’écrans. Aux marques et donc à nous pour elles, de trouver le bon contenu pour que l’empreinte du podcast résonne longtemps dans les esprits de leurs écosystèmes.