Clarisse Ferreres-Frechon (Melchior) "on s’oriente vers une consommation très franco-française pour tous les secteurs"
Nous continuons sagement à confiner avec vous. Et continuons notre série d'entretiens matinaux, débutée le 17 mars (!), avec aujourd'hui celui d'une professionnelle de l'art de vivre : Clarisse Ferreres-Frechon fondatrice de l’agence Melchior.
1) On vous connaît comme une agence spécialiste de l'art de vivre, de la gastronomie au tourisme...Comment continuez-vous à travailler ?
Clarisse Ferreres-Frechon : effectivement la grande majorité de nos clients sont des acteurs de la gastronomie et du tourisme, donc tout notre écosystème s’est brutalement arrêté. Mais il est apparu comme une évidence que plus que jamais nous devions être aux côtés de nos clients dans cette période terriblement difficile. Nous avons fermé les bureaux de l’agence pour passer en télétravail, nous avons réorganisé notre activité, Mes associées et moi avons travaillé pendant trois jours quasiment jour et nuit pour s’adapter aux mesures annoncées et être agiles en un temps record. Nous avons organisé l’équipe pour qu’ils soient une partie de leur temps en télétravail et une partie de leur temps en chômage partiel. Le premier jour, j’ai défini les deux priorités qui étaient importantes dans la crise que l’on vivait : protéger mon équipe de la crise. Nous avons été totalement transparentes avec eux, nous avons tout fait pour les rassurer, ne pas les mettre dans une situation d’incertitude et de peur pour leur emploi et l’avenir. Nous avons décidé de maintenir leur salaire à 100% pour qu’ils puissent vivre la période sereinement concernant ce point, être là comme toujours pour nos clients et plus que jamais, quoiqu’il arrive. Nous sommes là, à 1000 % pour tous, nous sommes des guerriers pour eux. Pour les aider à traverser cette crise ensemble et avec succès.
2) Quelles sont les réactions de vos clients ? Quelles stratégies de communication préconisez-vous ?
Clarisse Ferreres-Frechon : nous avons plusieurs typologies de clients et chacun est confronté à ses propres difficultés selon sa situation géographique, son business model et son mix clientèle. La majorité a été obligée de fermer et d’autres sont restés ouverts, mais ont adapté ou transformé leur business model. Donc nous adaptons pour chacun d’entre eux notre stratégie. Nous avons un double rôle à jouer pour nos clients depuis l’annonce de la fermeture des établissements : faire en sorte qu’ils soient visibles et pertinents dans les médias pendant leur période de fermeture en adaptant nos angles de prises de parole avec le ton juste, une communication opportune et pas opportuniste en adéquation avec l’actualité et dès la réouverture pour leur assurer une reprise de l’activité rapide et solide. Mais aussi et surtout, nous devons les alerter qu’à la reprise, c’est un nouveau monde qui commence. On n’agira pas comme avant, on ne consommera pas comme avant, donc on ne communiquera pas comme avant. On doit réinventer le jeu. On doit repenser toutes nos stratégies de communication pour accompagner nos clients vers la meilleure communication qui soit et la plus adaptée. Nous devons penser demain.
3) De quelles manières, préparez-vous "l'après" ? Pour l'agence et pour les prises de parole des clients que vous accompagnez ?
Clarisse Ferreres-Frechon : je suis très attentive à tout ce qui se déroule actuellement : j’écoute, je lis beaucoup, j’échange constamment avec les acteurs du secteur et je prends du recul sur la situation. J’analyse précisément ce qui se passe dans notre secteur, mais aussi dans les autres domaines pour comprendre quels sont les grands mouvements qui émergent. A partir de tout cela, je travaille sur une stratégie globale pour l’agence et nous travaillons tous ensemble sur de nouveaux plans d’actions adaptés à chacun de nos clients. Je vois dans cette crise une opportunité de se réinventer, de se dépasser, et de se remettre en question sur les orientations stratégiques que nous prenons. Bien entendu, nous vivons une période difficile économiquement, mais plus que jamais nous devons prendre le temps de réfléchir, de prendre du recul pour comprendre ce qui est en train de se passer. Je suis infiniment optimiste pour l’avenir, car j’ai le sentiment que le monde sera meilleur après tout cela. Je suis convaincue que la typologie d’acteurs du tourisme et de la gastronomie va changer. Nous allons voir émerger davantage de projets et d’acteurs porteurs de sens, de valeurs et de renouveau. Dans les mois qui viennent, il est très clair que l’on s’oriente vers une consommation plus raisonnée, plus responsable mais surtout très franco-française pour tous les secteurs. Il va être très intéressant pour nous d’observer ces mutations, de les accompagner et je trouve très excitant de travailler avec de nouveaux acteurs.
4) Avez-vous noté des prises de parole intéressantes dans votre secteur depuis que tout est bloqué ?
Clarisse Ferreres-Frechon : je suis très attentive à la situation pour les restaurateurs, qui ont été les premiers à fermer et qui seront les derniers à rouvrir. De nombreux chefs sont mobilisés pour faire entendre leur voix, mais ils sont encore malheureusement en ordre dispersés et n’arrivent pas à avoir une communication claire, structurée, précise pour peser sur leur sort auprès du gouvernement. Je milite beaucoup pour une union des forces.