Covid-19 : Les Français toujours friands de produits bio
L’application du confinement en France depuis le 17 mars bouleverse la consommation et accentue la dynamique des produits bio. Une tendance qu'a décidé d'étudier la société internationale de mesure et d'analyse des données Nielsen, au travers d'une nouvelle méthodologie.
Après les pâtes, le riz et les conserves, que les professionnels de la grande distribution ont vu être saisis d'assaut par les consommateurs, par peur de manquer de réserves en cuisine et d'attraper le virus, c'est au tour des produits bio d'être sollicités par les Français. Comme l'explique la société Nielsen dans une nouvelle étude sur la consommation, la séquence actuelle pourrait favoriser l’adoption des produits alternatifs dans l’alimentation de demain des Français. Aussi, en 2019, les produits bio étaient encore responsables de 93% de la croissance des produits de grande consommation en France et voyaient leur chiffre d’affaires progresser de 19% . Mais qu'en est-il d'aujourd'hui ? Ces références sont-elles toujours aussi populaires dans les caddies ? Quelles sont les préférences des consommateurs en cette période si particulière ? La réponse est positive : tous les voyants sont au vert pour le bio.
Le bio toujours en force en rayon
Depuis le début de la séquence Covid-19, les produits bio sont non seulement en très forte croissance, mais en plus, l’écart de croissance avec les produits conventionnels se creuse (14 points). Un écart ayant parfois même dépassé les 20 points. À cette croissance en grandes surfaces, s’ajoute le développement des achats en magasins bio spécialisés (Biocoop, Naturalia, La Vie Claire, Bio C’ Bon, Naturéo), qui connaissent aussi une forte croissance en cette période de confinement. « La valeur du panier moyen y a augmenté de 48%, passant d’environ 40€ à 59€ depuis la mi-mars », explique notamment Alexandre Fantuz, directeur Marketing 2 de Biotopia, panéliste en magasins bio, dans un communiqué.
Les supermarchés de proximité font grimper la courbe
Autre facteur favorable à l'essor du bio : le fait que les consommateurs privilégient les commerces proches de leur domicile. En effet, parmi les circuits de grande distribution qui participent à la croissance du bio, on note au delà des supermarchés, les magasins de proximité et le drive. Drive qui voit aussi les produits conventionnels connaître un dynamisme important; soit le reflet de l’attractivité de ce circuit (qui a converti 500 000 foyers supplémentaires en à peine un mois). Antoine Lecoq, consultant analytique chez Nielsen, l'explique par plusieurs phénomènes : « Tout d’abord les produits bio, perçus comme plus naturels que les autres, restent recherchés par les consommateurs, surtout dans une période de doute, où les produits vus comme globalisés sont sous le feu des critiques. Ensuite, en moyenne, et même s’il peut y avoir des différences d’une catégorie de produits à l’autre, le bio est un peu moins rupturiste que le conventionnel, ce qui signifie que quand les rayons sont vides, il y a plus de chances de pouvoir encore trouver des produits bio en rayon. Enfin, le recentrage sur le commerce en ligne ou de proximité, où le poids du bio est structurellement plus important, joue mécaniquement en faveur de la croissance de ces produits ».
Le bio également dynamique sur les produits de base
Si sur certaines catégories alimentaires de base, comme le riz, les pâtes, le sucre, la farine ou les oeufs, certains pourraient penser que les Français ont favorisé les produits les plus élémentaires au détriment du bio, il n'en est rien. En effet, il s'avère que pour la plupart des catégories, les ventes de bio restent plus dynamiques, parfois de façon nette, en comparaison à celles des références conventionnelles. Un signe que les consommateurs ont continué à privilégier ces produits, vus comme plus qualitatifs.
Aussi, « il ne faut pas oublier que le bio représentait déjà une part importante des ventes de ces catégories avant la période de crise. Et puis ce sont des produits de base, fortement consommés par les familles qui sont aussi de grandes consommatrices du bio, et en prenant plus de repas à domicile que d’habitude, elles amplifient naturellement la consommation de ces produits », précise Emmanuel Fournet, directeur insights et analytics chez Nielsen.
Géographie d'une croissance
Enfin, la croissance du bio, bien que visible sur l’ensemble du territoire français, répond aussi à une logique géographique liée à la localisation de la clientèle. Ainsi, les départements où la croissance du bio est la plus forte, lors de la dernière semaine de mars, se situent dans le nord et le nord-ouest, ainsi que dans l’est et le sud-ouest. Une carte de France de la croissance du bio, qui devient alors le reflet de nos habitudes alimentaires. À commencer par les familles, soucieuses du bien-être des enfants (les familles étant plus représentées dans ces départements) qui favorisent la qualité plutôt que les prix bas. Nielsen constate également que, c'est souvent dans ces mêmes départements, que l’écart de croissance entre produits bio et produits conventionnels est le plus fort. En revanche, le dynamisme des produits bio est plus limité en région parisienne et dans la capitale. Ce qui peut en partie s’expliquer par l’exode provincial d’une population qui sur-consomme du bio habituellement. Et en ce qui concerne l'avenir ? Àl'avenir, poursuit le document, les implications ne se limiteront sans doute pas au bio. C'est l’ensemble des produits aux promesses alternatives (végétaux, écologiques, locaux...) qui tireront probablement leur épingle du jeu, au sortie de cette crise sanitaire. Ainsi, il est constaté, en ce qui concerne les produits de papier et d’entretien écologiques, que ces derniers sont en croissance (+62% contre +25% pour les produits conventionnels de ces mêmes rayons), depuis un mois.
Et le bio post-confinement alors ?
De la même manière que la crise actuelle pourrait avoir comme conséquence l’accélération de l’adoption du e-commerce, le bio, et les promesses alternatives dans leur ensemble, pourraient convaincre de nouvelles cibles. Conquérir de nouveaux territoires et à terme, encourager leur développement et leur présence dans le panier « post-Covid » des Français. « La crise sanitaire que nous traversons va remettre un fort focus sur les produits santé, comme on le constate déjà dans l’opinion publique en Asie, et pousser les distributeurs à aller encore plus loin dans l’assortiment de produits frais, pour répondre à une consommation accrue à domicile (moins de voyages, plus de télétravail, moindre fréquentation des restaurants). Deux phénomènes qui pourraient bien profiter au bio, sur les catégories où il est encore à développer », conclut Daniel Ducrocq, directeur des services à la distribution chez Nielsen. Reste à savoir si ces préférences viendront aider la grande distribution et les hypermarchés très fragilisés depuis le début du confinement.
Méthodologie : Nielsen est divisée en deux business units. Nielsen Global Media, en tant que juge de paix pour l'univers des médias, fournit à l'écosystème des médias et de la publicité des mesures impartiales pour une compréhension commune de l'industrie. Nielsen Global Connect fournit aux fabricants et distributeurs de la grande consommation, des informations et points de vue et une image complète d'un marché complexe et en mouvement, dont les entreprises ont besoin pour innover et se développer. Nielsen opère par ailleurs dans plus de 100 pays à travers le globe, représentant plus de 90% de la population mondiale.