Comment TF1 se transforme en incubant des start-up
Arnaud Mopin présente ce matin les cinq startups qui ont fait leur entrée dans la quatrième saison du programme d’accélération Media Lab TF1 à Station F, début octobre. En poste depuis le mois de septembre, le nouveau directeur de l’innovation du groupe TF1 s’est confié en exclusivité à CB News. Au menu : stratégie du groupe, avenir des incubés, enjeu de transformation…
Pourquoi le groupe TF1 s’investit-il ici, à Station F ?
Notre direction de l’innovation a plusieurs activités : la veille, pour sourcer les nouvelles tendances et alimenter les métiers sur les évolutions des équipements, des consommations et des usages, mais aussi produire des études pour répondre aux problématiques que l’on veut adresser sur les tendances de marché. A côté et ce depuis 2015, le groupe TF1 a lancé une démarche d’open innovation, pour s’appuyer sur l’écosystème startups, et notre présence à Station F est la conséquence de cette volonté affirmée d’allier les actifs et les expertises de TF1 avec ce que peuvent nous apporter les startups dans leur façon de voir certains sujets, leur techno, pour voir merger les deux.
Quel est l’enjeu de programme pour TF1 ?
Notre enjeu est de mettre en lien nos métiers et des idées nouvelles, sur des problématiques qui sont parfois assez émergeantes, de pouvoir marier les deux, pour pouvoir faire bénéficier à la start-up de nos assets et nous de l’expertise d’une nouvelle génération d’entrepreneurs, que va nous apporter cette agilité-là.
Comment se passe la relation entre les métiers TF1 et les start-up ?
Il y a un équilibre fort dans la relation entre le sponsor chez TF1 et la start-up. Le sponsor attend beaucoup de la collaboration avec la start-up et il sait aussi que sur des expertises très précises il va pouvoir apprendre beaucoup de la start-up et monter en compétences. La start-up, en parallèle, est en capacité elle de développer son produit de façon très concrète, avec des opérationnels. Cela va vraiment lui faire gagner un temps fou. C’est cet équilibre-là qu’on a réussi à construire au fur et à mesure, qu’on veut absolument maintenir.
En quoi consiste votre programme d’accElération ?
A Station F, le groupe TF1 propose plusieurs choses. D’abord, le programme est d’une durée de six mois, dans laquelle il y a l’hébergement et l’accès à tout l’écosystème présence ici. Ensuite, et c’est très important pour nous, il y a l’accompagnement avec des sponsors métiers chez nous : pour chaque start-up qu’on va accélérer, on va identifier un sponsor très précis et une problématique à adresser très précise. Pour les start-up, c’est une valeur ajoutée très forte. Elles sont également accompagnées par une équipe de Roland Berger sur leur process de développement, indépendamment du groupe TF1 : levée de fonds, financement, positionnement marché, VC… Enfin, on met en place nos expertises, liées aux médias, à ce qu’on sait faire. Le tout gratuitement.
Comment repérez-vous les start up à incuber ?
Les prérequis d’entrée sont le besoin de répondre à un nouveau besoin ou bien l’exploration de nouveaux sujets comme l’IA par exemple. Soit on les repère dans des évènements comme Vivatech, soit ce sont les équipes opérationnelles qui les repèrent. Dans ce cas-là, on devient un cadre qui vient faciliter la collaboration avec la startup pour le métier. L’intérêt de la démarche d’accélération aussi, c’est son côté timeboxing de six mois. Cela permet d’avoir un focus assez fort, dans une notion du temps dans un grand groupe qui peut être un peu plus longue, avec des startups qui ont des problématiques au mois ou à la semaine. C’est assez intéressant de réussir à faire atterrir cette notion dans un calendrier très contraint, c’est une vertu. Parfois les métiers nous disent qu’ils aimeraient bien bosser avec une startup : la faire rentrer dans le programme permet de timeboxer un peu la collaboration.
Vous choisissez donc les start-up uniquement si elles apportent quelque chose au groupe ?
Oui, on assume et on pense que c’est d’ailleurs une proposition de valeur assez forte du programme. Les start-up nous le disent, l’intérêt est d’avoir accès à nos métiers et notre expertise. C’est là-dessus qu’ils vont pouvoir créer de la valeur et c’est ce mariage que les start-up viennent chercher dans notre programme. Ce qu’elles viennent chercher aussi, c’est qu’on devienne leur client : on se doit de devenir une référence importante pour elles, pour tenir notre promesse.
Les incubés made in TF1 ont-ils le droit d’aller voir la concurrence ?
Bien sûr, et on le recommande ! On a plutôt intérêt que ces start up grossissent et aient du marché, parce qu’à la fin, si on veut exploiter leurs solutions de façon pérenne et industrielle, il faut qu’elles aient un autre client que TF1. C’est un risque d’avoir une start-up mono-client : il y a une dépendance économique qui n’est jamais vertueuse, et s’il y a d’autres clients, cela valide la solution, cela rassure. Si France Télévisions ou M6 bossent avec une start-up qu’on a accélérée, on est ravis.
Quel retour sur investissement pour le groupe TF1 ?
Notre objectif direct n’est pas financier, il est d’apporter de la valeur au groupe. On veut créer de nouvelles formes de collaboration opérationnelle. En termes d’acculturation de nos équipes en interne, on montre que l’on peut faire différemment. Le programme participe à l’objectif de transformation du groupe TF1, en apportant de nouvelles méthodes de travail et des solutions innovantes. Si on n’a pas de ROI en termes financiers, on se fixe des KPI’s lors de la collaboration. C’est cela qu’on mesure.