L'ex-ministre de la Culture Fleur Pellerin soupçonnée de ‘’prise illégale d'intérêts’’
L'ex-ministre de la Culture Fleur Pellerin, reconvertie dans le privé, est soupçonnée de « prise illégale d'intérêts » pour avoir noué des contrats avec un géant du web sud-coréen qui fut l'un de ses interlocuteurs au gouvernement, selon un rapport administratif publié mercredi au Journal Officiel. Dans ce rapport, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui a transmis un signalement au parquet, estime que Mme Pellerin a « méconnu [ses] réserves en prenant pour client une entreprise privée avec laquelle elle avait conclu un contrat ou formulé un avis sur un contrat » dans le cadre de ses fonctions gouvernementales. Fleur Pellerin, à la tête de la société d'investissements Korelya Consulting qu'elle a fondée, gérait depuis septembre 2016 un fonds « intégralement doté par la société Naver Corp », un poids lourd du web sud-coréen, rappelle d'abord la HATVP. Or la Haute autorité s'est aperçue que Fleur Pellerin, ministre de la Culture de fin août 2014 à février 2016, avait signé, quand elle était encore au gouvernement, une « lettre d'intention » avec Naver Corp le 4 novembre 2015 en vue de la diffusion de contenus vidéos sur les événements de l'année France-Corée. Puis l'institut français de Corée du sud et la société Naver avaient conclu « une convention de partenariat » le 17 mars 2016, à une date où Fleur Pellerin n'était plus en fonction. Selon des médias, Korelya Consulting a levé un total de 200 millions d'euros en 2016-2017 auprès du groupe sud-coréen, qui gère le premier moteur de recherche local.
C'est en vertu de la loi sur la transparence de la vie publique du 11 octobre 2013, qui a élargi ses pouvoirs, que la HATVP s'est penchée sur les activités de Fleur Pellerin. Cette autorité indépendante est chargée de contrôler pendant trois ans les reconversions dans le privé d'anciens responsables publics, qualifiées de « pantouflage ». A ce titre, l'ex-ministre avait saisi la HATVP le 9 juin 2016, quelques mois après son départ du gouvernement socialiste de François Hollande, pour qu'elle se prononce sur d'éventuelles difficultés déontologiques autour de la création de Korelya Consulting, destinée à accompagner des investissements dans les start-up digitales en Europe. Le 21 juillet 2016, la HATVP a bien émis un « avis de compatibilité » mais « sous réserve d'un certain nombre de précautions visant à prévenir l'infraction de prise illégale d'intérêts ». Concrètement, la société de Mme Pellerin ne pouvait pas « jusqu'au 11 février 2019 » fournir des prestations à des entreprises qui « ont bénéficié » d'aides financières ou de décisions de la part du ministère de la Culture et de la communication ou « conclu des contrats » avec ses services. Et ce sur la période où Fleur Pellerin dirigeait ce ministère, soit entre le 26 août 2014 et le 11 février 2016. Invitée à s'expliquer, l'ex-ministre entrée au gouvernement au 2012 a répondu en mai 2018 que la lettre d'intention évoquée par la HATVP ne pouvait être assimilée à un contrat.