Libération replonge dans la crise
Alors qu'un plan d'économies prévoyant notamment une baisse des salaires est en préparation, les salariés ont voté une motion de défiance réclamant le départ de Nicolas Demorand et Philippe Nicolas, co-présidents du directoire.
Les salariés de Libération ont contesté mardi à une quasi-unanimité leurs dirigeants après la présentation d'un plan de rigueur prévoyant notamment une baisse des salaires, plan que la direction juge indispensable pour sauver l'emploi et le journal. Encore plus que les autres quotidiens, Libération a subi une dégringolade de ses ventes au numéro, qui ont plongé de presque 30% cette année. Après trois ans à l'équilibre, "Libé" devrait perdre plus d'un million d'euros en 2013, ont expliqué selon Nicolas Demorand et Philippe Nicolas, co-présidents du directoire. Une perte faible par rapport à celles prévues cette année au Parisien ou aux Echos, mais dangereuse pour l'un des seuls quotidiens qui n'est pas adossé à un groupe solide. De plus, le journal doit aussi finir de rembourser une dette d'encore 6 millions d'euros, à hauteur de 1,5 million par an. Pour se remettre à flot, soulignant qu'elle "donne la priorité au maintien de l'emploi et refuse un plan social", la direction a présenté un plan de réduction des coûts dont une baisse "temporaire" des salaires, des départs volontaires à la retraite et des passages à temps partiel.
4 millions d'économies
Concrètement, le plan présenté prévoit 4 millions d'euros d'économies, dont "2 millions d'euros sur la masse salariale" qui s'élève au total à 21 millions par an. Soit une baisse des salaires de 10%, graduée, avec une baisse plus forte pour les hauts salaires et réduite pour les bas salaires, a précisé le délégué SUD, Tonino Serafini. Les salaires reviendraient à leur niveau antérieur si la situation s'améliore. En réponse, une assemblée générale, qui a réuni mardi près de trois-quarts des salariés a voté à 90% en faveur d'une motion de défiance qui réclame le départ de Nicolas Demorand et Philippe Nicolas pour "rendre possible la mise en place d'un vrai projet de développement et d'un plan d'économies légal et crédible".
Dès avant le résultat, les actionnaires de Libération ont annoncé qu'ils soutiendraient la direction. "Quel que soit le résultat du vote, les actionnaires soutiennent le directoire", a affirmé François Moulias, représentant de la société Bruno Ledoux, qui s'exprimait au nom des actionnaires. La situation est d'autant plus délicate pour Libération que ses actionnaires -- principalement les hommes d'affaires Bruno Ledoux, Édouard de Rothschild et le groupe italien Ersel -- ont refusé de remettre de l'argent. De plus les actionnaires italiens du journal "veulent sortir", ont expliqué MM. Demorand et Nicolas. Aussi la direction cherche "un nouvel actionnaire de référence, de long terme, avec une vision stratégique, dans les mois qui viennent", explique Nicolas Demorand. Autre réforme annoncée, une refonte éditoriale : la version papier deviendra "plus dense et plus tournée vers l'analyse et le décryptage", alors que le site sera plus consacré à l'actualité chaude.