Les Français font moins l’amour : bonne ou mauvaise nouvelle ?

Couple lit

Derrière les chiffres, une dissociation croissante entre conjugalité et sexualité.

Dans une étude Ifop publiée en février, on apprenait que l’activité sexuelle en France enregistrait un recul sans précédent. La proportion de Français(es) ayant eu un rapport au cours des 12 derniers mois n’ayant jamais été aussi faible en 50 ans : 76% en 2024 contre 91% en 2006 et en 1992, 85% en 1970. Cette montée de l’inactivité sexuelle affecterait tout particulièrement la jeunesse : plus d’un quart des jeunes de 18 à 24 ans initiés sexuellement (28%) disent ne pas avoir eu de rapport en un an, soit cinq fois plus qu’en 2006 (5%).

Au premier abord, on pourrait penser que cette baisse d’activité est plutôt une mauvaise nouvelle, en partant du principe que, quand on fait l’amour, on ne fait pas la guerre. On peut aussi penser que c’est une mauvaise nouvelle pour le taux de natalité de la démographie française car, pour faire un enfant, il est souvent préférable de commencer par faire l’amour. « La fréquence des rapports a toujours joué un rôle dans la détermination du niveau de la fertilité des couples », nous rappelle l’étude. Et il se trouve justement que l’Insee nous dit qu’en 2023, l’indicateur de fécondité s’est établi à 1,68 enfant par femme en 2023, soit le niveau le plus bas depuis la Seconde Guerre mondiale, hormis en 1993 et 1994. Seuls 678 000 bébés sont nés en France en 2023, soit 6,6% de moins qu’en 2022 et près de 20% de moins qu’en 2010. Un faible taux de natalité observé plusieurs années de suite a forcément un impact négatif sur la consommation et l’économie du pays (à commencer par le marché des jouets). Sans parler des conséquences à long terme liées à la déformation de la pyramide des âges, comme le recrutement des entreprises et le paiement des retraites.

Mais la baisse de l’activité sexuelle est aussi une bonne nouvelle sous d’autres angles que nous donne à voir l’étude Ifop (réalisée pour LELO). Ainsi ce chiffre frappant : 52% des femmes âgées de 18 à 49 ans déclarent qu’il leur arrive de faire l’amour sans en avoir envie. C’est beaucoup. Mais c’est aussi beaucoup moins qu’en 1981 où elles étaient 76% dans cette situation ! La notion de « devoir conjugal » régresse. Place à la culture du consentement. Autre évolution remarquable, qui concerne là aussi les femmes en premier : 62% des Françaises accordent aujourd’hui de l’importance à la sexualité dans leur vie, alors qu’elles étaient 82% en 1996 et en 2006. Chez les hommes, ce taux est de 75% en 2024. L’étude conclut qu’« après des années d’hypersexualisation de la société, les décennies 2010/2020 marquent bien l’amorce d’un nouveau cycle où la contrainte à avoir une vie sexuelle pour faire « plaisir » ou « comme tout le monde » se fait moins forte » et que « nombre de femmes ne se sentent plus obligées de répondre au désir sexuel de leur partenaire, certaines se tournant même vers des attitudes plus radicales comme l’asexualité et l’abstinence ».

Autre bonne nouvelle (si l’on peut dire) est que la baisse de l’activité sexuelle profite aux médias, notamment TV, gaming et social : 

  • 50% des hommes et 41% des femmes de moins de 35 ans vivant en couple sous le même toit reconnaissent avoir déjà évité ou reporté un rapport sexuel pour regarder une série ou un film à la télévision.
  • Chez ces jeunes hommes, ces taux sont aussi élevés pour jouer aux jeux vidéo (53%) et pour consulter des réseaux sociaux de partage de photos ou de vidéos (48%).

La lecture fait aussi concurrence au sexe car 43% des hommes et 28% des femmes de moins de 35 ans vivant en couple sous le même toit reconnaissent avoir déjà évité ou reporté un rapport sexuel pour lire un livre ou un article. En espérant que ce ne soit pas celui-ci.

Méthodologie : Réalisé avec l’Ifop, l’observatoire LELO de la sexualité des Français est basé sur une enquête menée en ligne du 29 décembre 2023 au 2 janvier 2024, auprès d’un échantillon de 1911 personnes, représentatif de la population vivant en France métropolitaine âgée de 18 ans et plus. La représentativité de l’échantillon a été assurée par la méthode des quotas (sexe, âge, profession, statut marital) après stratification par région et catégorie d’agglomération. L’étude est consultable ici.

À lire aussi

Filtrer par