La triple incertitude qui pèse sur le marché publicitaire digital
Evalué à près de 8 milliards d’euros en France, le marché de la publicité digitale est menacé par une triple incertitude que les acteurs européens de l’adtech sont toutefois en mesure de lever. Une tribune de Katja Henneveld, Country Manager France, Belgique et Pays-Bas de Adform
Après des années d’hypercroissance, les acteurs de la publicité digitale se préparent à traverser des années difficiles, marquées par une triple incertitude, à la fois technique, juridique et politique.
Une incertitude technique
Après 25 ans de bons et loyaux services, le « cookies tiers », qui était utilisé aussi bien pour gérer la pression publicitaire que pour cibler plus efficacement les internautes, sera bientôt purement et simplement interdit par Google, dont le navigateur Chrome est utilisé par près des 2/3 des internautes.
Si la « privacy sandbox » de Google propose des alternatives comme le ciblage de cohortes partageant les mêmes centres d’intérêt, beaucoup d’annonceurs refusent toutefois d’abandonner l’idée d’un marketing one-to-one et cherchent des alternatives, reposant sur de nouveaux identifiants techniques.
Pour le moment, aucune technologie ne s’est toutefois imposée et pour les marques souhaitant lever cette incertitude technique, la seule solution consiste à adopter des solutions permettant d’agréger les différents « First Party ID » du marché afin de concilier leurs objectifs de couverture et d’efficacité de leurs ciblage publicitaires.
Une incertitude juridique
A cette incertitude technique, initiée par les grands navigateurs web, s’additionne une incertitude juridique, liée à la mise en oeuvre de nouveaux textes comme le RGPD Européen, le CCPA californien, mais également l’abandon du Privacy Shield, entre l’Europe et les Etats-Unis.
Malgré l’optimisme de Ursula Van Der Leyer, présidente de la commission européenne, les autorités de régulation comme la CNIL française ont récemment estimé que des outils comme Google Analytics transférait des données personnelles de citoyens européens aux Etats-Unis, et que cela contrevenait au RGPD.
Si elle se confirmait, cette incertitude juridique obligerait les marques à abandonner non seulement les outils de mesure d’audience, mais également de grands outils publicitaires, comme les DSP, les SSP ou les DMP, qui manipulent également de grandes quantités de données de citoyens européens… sur des serveurs pouvant se trouver aux Etats-Unis ou désormais en Chine.
Une incertitude politique
A ces incertitudes techniques et juridiques, s’ajoutent enfin une incertitude politique, avec l’étonnant activisme de Bruxelles qui semble mettre fin à deux décennies de naïveté digitale.
Avec de nouveaux textes comme le « Digital Markets Act » ou le « Digital Service Act », l’ambition de Bruxelles est clairement de briser les positions dominantes de grands acteurs numériques numériques transnationaux, au nom du respect de la concurrence.
Dès 2023, les annonceurs européens pourraient être invités à opter pour des technologies « souveraines », non seulement en Europe, mais également au-delà des frontières du vieux continent, afin de redonner du dynamisme à l’ensemble de l’économie digitale.
Choisir des adtechs européennes
Pour les annonceurs et les agences, il est probablement temps de remettre à plat leur stratégie digitale en optant pour des outils capables de lever les incertitudes techniques, juridiques et politiques, des prochaines années.
La bonne nouvelle est qu’il existe déjà des adtech européennes, prêtes pour « l’après cookie », respectueuses du RGPD et du Privacy Shield, et qui ne sont pas en position dominante sur leur marché.
Sans attendre d’être au pied du mur, les marques peuvent s’y préparer dès maintenant et ainsi définitivement lever cette triple incertitude qui pèse sur le marché, et sur leur croissance des prochaines années.
(Les tribunes publiées sont sous la responsabilité de leurs auteurs et n'engagent pas CB News).